Il faut attendre les deux tiers du premier épisode et une première épiphanie dolanienne pour que la série prenne son envol. C’est une longue scène d’agonie en trois temps. Celle de Mado (Anne Dorval, évidemment), la mère de la fratrie au centre de l’intrigue : un combo musical sublime (This Mortal Coil / Rufus Wainwright), une lumière dorée qui accompagne les derniers instants et l’orage qui les suit donnent le ton.
La Nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé a eu lieu vingt-huit ans plus tôt, dans cette petite ville québécoise de Val-des-chutes et aura, entre temps, bouleversé la famille Larouche : Mireille, celle qui est partie à Montréal poursuivre une belle carrière de thanatologue et une sexualité autodestructrice ; Julien, le leader séduisant qui semble passer à côté de sa vie ; Denis, le divorcé un peu paumé ; et Elliot (Dolan himself), le benjamin fragile qui sort à peine de désintox.
Si Eros, Thanatos, et les addictions sont au cœur des dysfonctionnements de cette famille, tout s’est joué cette fameuse nuit, un secret tellement bien gardé qu’il agit comme une force destructrice insidieuse et inarrêtable.
Couleurs automnales saturées, bascule incessante (et agile) du récit entre les époques, ambiances nocturnes, venteuses et vintage. En épousant les codes du cinéma de genre américain, Dolan signe cinq épisodes d’une série horrifique dans laquelle les monstres à combattre sont des démons intérieurs, les traumas du passé et les mensonges qu’on se fait à soi-même. La mise en scène est virtuose et se met au service d’un récit singulier et bouleversant.
La série sera diffusée à partir de janvier sur Canal+.