Sorti aux États-Unis le 12 février 1993, deux jours avant la Saint-Valentin, Un jour sans fin relève de la comédie romantique mais aussi du genre fantastique. On suit l’histoire de Phil Connors (Bill Murray), présentateur météo venu faire son reportage annuel à Punxsutawney, où l’on fête le Jour de la marmotte. Quand Phil se réveille le lendemain, il comprend que tout se produit rigoureusement comme la veille et qu’il est condamné à revivre éternellement la même journée.
« Ce film est en soi un conte philosophique, car l’idée de la répétition d’une même séquence temporelle se trouve aussi bien dans la pensée bouddhiste que dans les théories autour de la réincarnation », affirme Yal Sadat, auteur du livre Bill Murray. Commencez sans moi (Capricci, 2020). Si cette situation de répétition permet à Phil d’apprendre chaque jour à mieux connaître Rita (Andie MacDowell) pour construire une relation amoureuse avec elle, Bill Murray fut moins intéressé par l’aspect sentimental du film que par son sous-texte sur la liberté individuelle. « Murray est un lecteur de philosophie française qui, dans les années 1980, a fait une pause dans sa carrière d’acteur pour venir étudier à la Sorbonne. Il s’est intéressé à Jean-Paul Sartre et à Albert Camus, et il voulait qu’Un jour sans fin porte la trace de cet existentialisme. »
Le comédien eut ainsi le pouvoir d’orienter le film vers sa propre vision du monde. « Murray se plaint dans la vie d’une affliction qui serait de ne pas réussir à exister pleinement. Ce sentiment d’être prisonnier se ressent totalement dans ce récit où il est littéralement enfermé par une mise en scène qui reproduit sans cesse les mêmes moments, avec la même valeur de cadre. » Réflexion sur la possibilité ou non de s’affranchir de la lassitude existentielle, Un jour sans fin incarne aujourd’hui une mise en abyme tellement réussie que le film peut se regarder à l’infini.
Illustrations : SUN BAI pour TROISCOULEURS