Axelle Ropert interviewée par Anna, 17 ans

Anna a 17 ans, elle a interviewé Axelle Ropert, une critique et réalisatrice qui sort ce mois-ci « Petite Solange ». C’est l’histoire
d’une collégienne, interprétée par Jade Springer, qui assiste à la rupture de ses parents (joués par Léa Drucker et Philippe Katerine).


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Pourquoi avoir choisi le point de vue de l’enfant ?

C’est la raison essentielle pour laquelle j’ai eu envie de tourner ce film. Montrer comment une chose aussi banale qu’un divorce, pas spécialement dramatique, est vécue plutôt bien par les parents et comme une tragédie par leur fille. Mais attention, ce n’est pas du tout un film anti-divorce ! Je pense qu’il vaut mieux se séparer que de faire supporter d’innombrables disputes à un enfant.

Pourquoi avoir situé l’action du film à Nantes ?

Je sature de voir Paris dans les films. Nantes est une ville à proximité de la mer, traversée par les nuages, le ciel, l’air. Je voulais laisser respirer l’histoire, que cela ne soit pas un drame étouffant dans un appartement. 

« Petite Solange » : bleu à l’âme

J’ai pas mal pleuré pendant le film. Est-ce ce genre d’émotions que vous vouliez susciter ?

Complètement ! C’est merveilleux de faire pleurer les gens. Je voulais faire un mélo, les larmes sont donc recherchées dans le film. Je suis contente parce que les gens qui pleurent sont tous très différents et ne savent pas forcément pourquoi ils pleurent.

Le film est drôle aussi, notamment grâce au personnage de la copine de Solange. On sent beaucoup d’amour entre elles. Pensez-vous que l’amitié est très importante à l’adolescence ?

C’est fondamental ! On passe beaucoup de temps avec ses amies, à dire des trucs idiots, on glousse, et ça aide à tenir face au monde, face à ses parents, face aux drames. On se construit une bulle à part, qui nous sauve. Il y a quelque chose qui se marque à vie dans les amitiés adolescentes.

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J’aime beaucoup l’image et la lumière du film. Quel effet recherchiez-vous ?

C’est un film tourné en pellicule. L’image argentique n’a pas le côté lisse et glacé du numérique, il y a un grain particulier. J’adore la pellicule, pas par nostalgie, mais parce que c’est très beau pour fixer les teintes, les couleurs des peaux.

Pourquoi Solange s’appelle Solange ?

Au moment de l’écriture du scénario, j’ai regardé avec ma fille Les Demoiselles de Rochefort de Jacques Demy, et l’une des sœurs jumelles du film s’appelle Solange. Je trouve que c’est un prénom romantique, qui sonne mélo.

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À la fin du film, Solange regarde le spectateur dans les yeux, comme Jean-Pierre Léaud dans Les Quatre Cents Coups de François Truffaut.

Oui, ce n’est pas juste un clin d’œil. Mon envie secrète était de donner une petite sœur à Antoine Doinel. C’était un moyen de ramener Jean-Pierre Léaud et la Nouvelle Vague dans mon film. Sans la Nouvelle Vague, le cinéma français n’existerait pas tel qu’il est aujourd’hui. C’est un mouvement artistique fondateur.

Quels conseils pourriez-vous donner à des jeunes qui voudraient se lancer dans le cinéma ?

Tenter le concours des grandes écoles comme La Fémis, se servir de son téléphone pour tourner des petits films… Et il faut aller voir des films en salles ! J’adore les séries, mais pour avoir des sensations fortes il faut sortir de chez soi, voir un film projeté sur un grand écran, avec d’autres spectateurs. La cinéphilie, c’est une pratique magnifique. C’est voir beaucoup de films, des nouveaux, des anciens, des classiques et des navets ! Et surtout, quand on voit un film, essayer de noter ce qu’on en pense, ne pas juste consommer mais réfléchir sur le film qu’on vient de voir. Dans ma génération, j’étais une des rares filles cinéphiles. Je vous encourage, les filles, à investir la cinéphilie !

Petite Solange d’Axelle Ropert, Haut et Court (1 h 25), sortie le 2 février

Portrait (c) Claire Nicol