“Roule avec le doigt. Utilise ton pouce pour apprécier l’épaisseur.” Sur le plateau de Sans toit ni loi, à Nîmes, Sandrine Bonnaire, 18 ans, prend des cours de roulage de cigarette auprès d’Agnès Varda. La clope est un accessoire clé du personnage qu’elle incarne : Mona, une jeune sans abri qui décide de sa route au fil des rencontres.
Pas question de romantiser cette errance, c’est un film “sur les vrais pauvres” affirme la réalisatrice qui a métamorphosé sa jeune actrice – chaussures trouées, vêtements informes et cheveux gras – pour en faire ressortir toute “sa réserve de sauvagerie, de fierté et de jeunesse”. Une image de Sandrine Bonnaire bien différente de celle de la jeune fille en fleur d’A nos amours de Maurice Pialat – film qui l’a fait connaître et lui a valu un César du meilleur espoir féminin en 1984.
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Mais si le journaliste de France 3 Montpellier s’intéresse à ce tournage, ce n’est pas tant pour son scénario ou pour la renommée de la jeune actrice, mais parce que celui-ci signe le grand retour d’Agnès Varda qui n’a pas présenté de long métrage depuis son documentaire Mur Murs tourné aux Etats-Unis en 1980. Quand on lui demande pourquoi cette absence, la farouche réalisatrice ne cache pas son mécontentement : “Il faut demander aux distributeurs et aux producteurs pourquoi ils ne me donnent pas d’argent.”
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Ces fameux distributeurs et producteurs auraient pourtant mieux fait de parier sur Sans toit ni loi, qui récolte un Lion d’Or et un prix FIPRESCI à la Mostra de Venise ainsi qu’un César de la meilleure actrice pour Sandrine Bonnaire. Un film indispensable, à la frontière du romanesque et du documentaire, à voir ou revoir ce lundi 6 novembre sur Arte.
Et pour voir le film, disponible dès maintenant sur Arte.tv, cliquez ici.
Et pour ceux qui n’en auraient pas assez, l’exposition Viva Varda ! se tient encore jusqu’à fin janvier à la Cinémathèque Française.