MK2 CURIOSITY / LE CINÉMA EN VERSION TRÈS ORIGINALE
Quand on vous dit chaos au cinéma, quelle est la première image qui vous vient ?
Apocalypse Now.
Selon vous, le chaos fait partie du processus de création, que ce soit en tant que réalisateur ou acteur ?
Le tournage d’un film a quelque chose d’un chaos organisé. On prévoit le maximum de situations en préparation mais il y a évidemment une liste infinie d’imprévus – qui n’apportent pas forcément que de mauvaises choses. Du chaos naissent parfois de meilleures idées.
L’humour absurde, c’est une façon de rire du chaos pour le rendre moins effrayant ?
C’est une façon de rire tout court, déjà. Et le chaos n’est pas forcément effrayant !
On peut voir cette semaine sur mk2 Curiosity le génial Hamburger Film Sandwich de John Landis, qui met en scène une série de sketches signés par le collectif ZAZ pour dézinguer le consumérisme américain et l’industrie culturelle. Comment avez-vous découvert ce film que vous adorez ?
La vraie première baffe que je prends est The Groove Tube de Ken Shapiro, un film à sketches qui parodie et détourne les codes de la TV américaine des années 1970. La découverte de ce bijou m’a donné envie de voir d’autres perles du genre. Quelques années plus tard arrive Kentucky Fried Movie [le titre original de « Hamburger Film Sandwich », ndlr], puis Amazon Women on the Moon. Trois films construits plus ou moins sur le même modèle et dans le même esprit. Je me souviens avoir découvert Groove Tube et Kentucky Fried Movie au cinéma le Déjazet à Paris, qui programmait des films toute la nuit. J’ai énormément fréquenté cette salle à la fabuleuse programmation.
Alain Chabat, quel cinéphile êtes-vous ?« Hamburger Film Sandwich » de John Landis
Qu’est-ce qui vous plaît particulièrement dans l’écriture de ces sketchs et la construction du film ?
Les gags, la liberté de ton, l’écriture collective, imaginer les scénaristes se marrer à écrire ces conneries, le plaisir qu’a dû avoir le cast à jouer toutes ces scènes… Bref, un immense terrain de jeu pour que tout le monde s’amuse dans le but de faire marrer des salles de cinéma.
Hamburger Film Sandwich a été une source d’inspiration importante pour Les Nuls ou d’autres de vos projets ?
Oui, avec d’autres bien sûr, mais les ZAZ sont pour moi une inspiration majeure. Je suis fan.
Alain Chabat : « Pour Quentin Dupieux, je suis même prêt à jouer un rat »
LE CINÉMATON DE GÉRARD COURANT
Dans les années 1970, Gérard Courant s’est lancé dans un projet pour le moins original. Filmer des personnalités du milieu du cinéma et des médias pendant 3 minutes 30 chacune. En gros plan fixe, sans paroles. A ce jour, on compte 3 170 épisodes de son « Cinématon ». Soit 211 heures d’introspection d’acteurs, cinéastes, critiques, célébrités mais aussi de quidams. Comme Madame Mirmant, la concierge, « Cinématon n°1 ». Des vidéos qui pour certaines sont devenues cultes, et sur lesquelles vous êtes déjà sûrement tombés sans le savoir (Terry Gilliam, Jean-Luc Godard, Maurice Pialat, Frank Dubosc…). Et le tournage de ce film le plus long du monde est toujours en cours !
« J’étais en contact avec Alain Burosse, responsable des programmes courts de Canal+, qui avait déjà programmé des ‘Cinématons’ à l’antenne. Il m’a permis de rencontrer Philippe Gildas, animateur de l’émission « Nulle part ailleurs », toute la bande des Nuls, et même leur scénariste, un certain Christian Borde, devenu Jules-Édouard Moustic. Ils se sont tous prêtés au jeu avec plaisir pendant cet après-midi de tournage en caméra Super 8. ils étaient très sollicités mais ils ont dû trouver le concept sympathique. Je leur ai dit qu’ils étaient libres de faire ce qu’ils voulaient, à condition de ne pas parler. C’est Alain Chabat qui a eu l’idée de cette bouteille d’eau qu’il se renverse sur la tête. Quelques mois plus tard, Marc Frydman, un autre gars de Canal+ qui travaillait à l’administratif, a voulu aller encore plus loin. Son idée était de prouver qu’il pouvait boire toute une bouteille de whisky en 3 minutes 30. Il l’a vraiment fait ! » (Gérard Courant, réalisateur et producteur du « Cinématon »).
Photo : Julien Liénard pour TROISCOULEURS