« Tout le monde aime Jeanne » de Céline Devaux : une introspection acide et corrosive

Jeanne (Blanche Gardin), ruinée, doit faire l’inventaire de l’appartement lisboète de sa mère défunte… Céline Devaux se révèle en brillante cinéaste de l’introspection avec cette comédie acide et mélancolique qui donne la parole aux petits diables qui murmurent à nos oreilles.


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Dans le droit fil de sa récente série pour Canal+, La Meilleure Version de moi-même (2021), Blanche Gardin apparaît dans le premier long métrage de Céline Devaux avec un vague à l’âme, un air déboussolé. Elle est l’actrice contemporaine qui sait le plus subtilement sertir nos fragilités d’un humour noir corrosif, et elle s’en donne à cœur serré dans cette comédie sur fond de crise existentielle. Elle incarne Jeanne, brillante ingénieure dont l’ambitieux projet écologique tombe à l’eau et qui doit en même temps faire face à la mort de sa mère. Alors qu’elle doit vider l’appartement de celle-ci à Lisbonne, elle tombe sur un ancien copain de lycée, Jean (Laurent Lafitte), qui force la conversation de manière un peu lourde, et qu’elle ne cesse de recroiser…

« La meilleure version de moi-même » : les travers de l’époque

Avec un sens du rythme bluffant, la cinéaste ponctue le récit de courtes scènes d’animation. Hérissée par le tumulte émotionnel de la situation, la mauvaise conscience de l’héroïne, figurée par des esquisses nerveuses, s’y exprime de façon hyper mordante. Dans ces séquences animées, l’héroïne tape sur tout le monde quand, dans la scène d’avant ou d’après, elle paraît faussement impassible. S’ensuit un sentiment très cathartique, qui venge toutes les fois où l’on a gardé la face alors qu’à l’intérieur on explosait. Mais aussi un effet de désorientation, qui capte avec finesse l’errance du deuil.

Tout le monde aime Jeanne de Céline Devaux, Diaphana (1 h 35), sortie le 7 septembre

Image (c) Les Films du Worso – O som e a furia