Avec ce premier long métrage (réalisé après des courts métrages remarqués, dont First Night), le quadragénaire Andrei Tănase sort quelque peu des sentiers naturalistes généralement associés au cinéma roumain contemporain pour signer un conte hallucinatoire et troublant qui mélange vigoureusement les genres.
On y suit l’histoire de Vera (interprétée par Cătălina Moga), vétérinaire en deuil qui se réconforte en s’occupant d’une femelle tigre récemment arrivée dans son zoo. Découvrant un soir que son mari la trompe, Vera oublie alors de refermer la cage de la tigresse, qui s’enfuit dans la nature.
La réussite de ce film surprenant tient, au-delà des symbolismes qui découlent du parallèle dressé entre la tigresse enfermée dans la cage d’un zoo et l’héroïne au caractère intrépide qui cherche elle aussi à se libérer d’un carcan, à la façon enthousiaste dont le cinéaste entremêle les sensations et les tonalités.
Commençant comme un film d’action où l’héroïne tient un fusil qu’elle braque en direction de la caméra, ce récit – qui donne à voir la nature de Transylvanie et ses grandes forêts aux relents fantastiques – regarde du côté de la comédie de caractères ou du récit sentimental, tout en développant la dimension tragique du destin d’une femme résiliente qui vient de perdre son bébé.
Souvent habile sur un plan technique (les séquences avec la tigresse sont impressionnantes et ont bénéficié du travail du dresseur Thierry Le Portier, qui a ramené l’animal déjà vu dans L’Odyssée de Pi) et emmenée par la musique du français Jean-Benoît Dunckel, cette fable haute en couleurs fait de la dépression de son héroïne une aventure touchante et laisse planer autour d’elle un mystère qui n’a d’égale que la vitalité avec laquelle le personnage se relève.
Tigresse d’Andrei Tănase (Condor Distribution, 1h20), sortie le 7 août
Image : © Condor Distribution