Fondé en 2016 par Maud Geffray et Sébastien Chenut, duo de Scratch Massive qui a signé plusieurs musiques de films de Zoe Cassavetes et récemment celle du documentaire Room 2806 : The Accusation de Jalil Lespert, le label bORDEL RECORDS a demandé à ses artistes (Peter Dallas, Lësterr, Mickey van Seenus…) de participer à une compilation intitulée « Music in Films ». L’idée : composer des mixtapes électro à partir des B.O. de leurs films préférés – un défi cinéphile collectif qui donne lieu à une envoûtante odyssée musicale, entre synthwave, rock progressif, raretés étonnantes et pop décomplexée. En exclu, TROISCOULEURS vous propose de découvrir certaines de ces mixtapes, assorties de commentaires des musiciens, qui reviennent pour nous sur leurs influences et leurs rapports au ciné.
SCRATCH MASSIVE
« Ces séries de mix lancées sur notre label, c’est l’occasion pour nos artistes de faire le point sur leurs univers cinématographiques, de créer leurs propres voyages musicaux. L’idée est de reconstruire une B.O. ultime, aussi bien avec de la pop que des plages de beaux violons ou de synthétiseurs. On avait aussi l’impression que quand un artiste électro était interrogé sur les soundtracks qu’il aimait, on en revenait souvent à John Carpenter. On l’aime beaucoup, mais il y a tellement d’autres contrées à explorer… Dans notre mix, on avait envie de mêler des sons obscurs à des sons plus connus, voire des hits radio comme ‘Live To Tell’ de Madonna, un titre issu de la B.O. du film At Close Range de James Foley. Nous avons aussi travaillé autour du morceau techno ‘Blue’ de Latour, qu’on entend dans la scène de danse en club mythique de Basic Instinct. Le tout forme une belle histoire sonore, on s’y balade bien. »
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PETER DALLAS
« Dans mon processus créatif, l’image est ma source d’inspiration principale. J’ai l’habitude d’écrire sur des scènes de films qui me touchent particulièrement. Par exemple, il m’arrive de composer sur les premières images de Mean Streets de Martin Scorsese ou encore sur les dernières scènes de Paris, Texas de Wim Wenders. A travers ce mix, on retrouve des extraits de bandes-originales que Vangelis avait composé pour Blade Runner de Ridley Scott ou bien la partition au piano mélancolique et intime de Trent Reznor et Atticus Ross pour 90’s de Jonah Hill. J’ai préféré présenter des sons électroniques, pour la plupart relativement récents, plutôt que des classiques du genre tels que la B.O. de Midnight Express par Giorgio Moroder – même si je l’affectionne particulièrement. Mon choix est guidé par la volonté d’obtenir un mix homogène. Le but est de raconter une histoire, de proposer à ceux qui l’écouteront une certaine chronologie. »
MICKEY VAN SEENUS
« Pour être honnête, je ne suis pas ultra cinéphile, mais les films que j’aime, je les aime furieusement. Mon mix en est une sorte de condensé. Côté B.O., j’aime tout ce que fait Mica Levi. Elle a le don d’hypnotiser et de terrifier. John Waters est et a toujours été une grande source d’inspiration. Je crois que Cry-Baby est le premier film de lui que j’ai vu. Ce qui est sûr, c’est que Pink Flamingos est le premier film de lui que j’ai cherché à voir. Ce film me repoussait en même temps qu’il me faisait rire, il réunissait tellement d’éléments de la contre-culture, ça m’a donné envie de creuser plus loin. Buffalo’66 de Vincent Gallo est aussi une œuvre de laquelle je me sens proche. La version de « Fool’s Rush in » chantée par le père de Gallo est si spéciale et éclatante, il fallait l’inclure. Le film est problématique en soi, Vincent Gallo l’est aussi. Mais c’est un film conscient de ça, et Christina Ricci y est incroyablement charmante. Il y a aussi Shining de Kubrick, mon film de Noël préféré – un autre exemple qui illustre mon goût pour l’inconfort. J’ai aussi parsemé le mix d’extraits tirés de vieux dessins-animés russes. Et puis il y a la chanson de « In Heaven » chantée par la femme dans le radiateur, personnage d’Eraserhead de David Lynch, dont j’aimerais faire une reprise un jour. C’est tellement bizarre, drôle et glaçant… Je citerais aussi The Rocky Horror Picture Show, The Labyrinth avec David Bowie, et Zoo de Peter Greenaway. C’est à la fois très stylé, rigolo et horrible. Dans une esthétique pastel très propre aux eighties, le film mêle la beauté au carnage, à la décomposition. »
LËSTERR
« Beaucoup des films que j’ai choisis sont de vraies inspirations de tout ce qui forme l’esthétique de mon projet aujourd’hui. Les films de Tim Burton ont été mes premières claques cinématographiques quand j’étais enfant. Ensuite, durant le mix, on passe un peu par tous les moments de ma vie : les sons de Requiem for a dream, Scream, The Ring renvoient aux films que je regardais ado. Ceux issus des films de Hayao Miyazaki ou des épisodes de Buffy contre les vampires ne m’ont jamais vraiment quitté, comme beaucoup de films d’horreur plus ou moins culte que j’adore. Et on termine sur mon obsession du moment pour les films de Dario Argento. »
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Image de couverture : Scratch Massive © Paul Henri Pesquet