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Vu à la Mostra de Venise 2024 : "Queer" de Luca Guadagnino

  • Timé Zoppé
  • 2024-09-04

[CRITIQUE] Le réalisateur italien nous avait laissés de marbre avec son triangle amoureux autour du tennis, "Challengers", sorti cette année. C’est tout l’inverse que nous a fait Queer, son adaptation de William S. Burroughs drôle et ultra romantique avec un Daniel Craig dans tous ses états, comme on ne l’avait jamais vu.

C’est peut-être la profusion d’effets-clips qu’on redoutait le plus parmi les tics de mise en scène qu’on peut trouver dans les derniers films de Luca Guadagnino. Au début de Queer, alors que Lee (Daniel Craig) sort de son bar préféré avec son costume en lin blanc au son de « Come as you are » de Nirvana, que la caméra filme au ralenti en s’attardant sur un attroupement d’hommes et de chiens agités dans une rue de Mexico, on a franchement redouté un énième effet de manche qui vaudrait seulement pour lui-même. Mais quand le regard de Lee croise celui d’un jeune homme magnifique (Drew Starkey) de l’autre côté de la mêlée - toujours au ralenti, toujours sur le morceau de Nirvana -, quelque chose a lieu. Lee tombe amoureux d’Eugene, et nous du film.

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Renouant avec le romantisme enfiévré de Call Me by Your Name (2017), Guadagnino va ainsi s’attacher, pendant 2h30, à capter tous les détails et soubresauts de l’amour et du désir lorsque l’on doute de leur réciprocité. Adaptée d’une nouvelle de William S. Burroughs écrite au début des années 1950, le récit est celui de Lee, un expatrié américain qui passe son temps à boire, fumer et se droguer au Mexique. Et à se demander, avec sa bande d’amis, qui est queer et qui ne l’est pas. Sa rencontre avec Eugene, mystérieux jeune photographe amateur d’échecs, donne soudain un sens à son existence. Queer ou pas queer ? La question ronge Lee jusqu’à la moëlle. Queer, c’est avant tout Lee qui l’est, dans son identité sexuelle, bien sûr, mais aussi au premier sens du terme : bizarre, étrange. S’il est autant rivé à l’idée qu’Eugene l’aime et le désire, c’est qu’il se déteste lui-même.

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L’occasion pour Daniel Craig de livrer une performance géniale, à l’opposée de James Bond, mix de grands moments de malaise et de charisme, le cheveu moite plaqué au crâne, la peau exsudant la sueur par hectolitres, les mains bourrues cherchant à tâter le moindre morceau de peau du bel Eugene. Un personnage à l’opposé de James Bond mais qui dialogue étonnamment avec un de ses premiers rôles, dans Love is the Devil de John Maybury (1998), dans lequel il incarnait le dernier compagnon, beaucoup plus jeune que lui, du peintre Francis Bacon, qui fut aussi sa muse. Vingt-cinq ans plus tard, on sent le plaisir de Daniel Craig à revenir à un tel type de rôles, plein d’aspérités et de profondeur. On sent aussi celui de Luca Guadagnino à filmer de nouveau des scènes de sexe, incarnées, vibrantes, romantiques et réalistes, comme dans Call Me by Your Name. On ne peut qu’espérer que l’un et l’autre continuent de faire pareils choix de carrière, et que le film puisse briller au palmarès de la Mostra.

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