Krzysztof Kieślowski vu par son coscénariste Krzysztof Piesiewicz

Cinéaste majeur du XXe siècle, le Polonais Krzysztof Kieślowski (1941-1996) est à l’honneur cet automne avec des ressorties de ses films en salles et DVD par mk2 et Potemkine Films, et une rétrospective à la Cinémathèque. L’occasion d’aller à la rencontre de ses plus proches collaborateurs. Aujourd’hui, Krzysztof Piesiewicz, coscénariste de tous ses films, de « Sans Fin » (1985) à « Trois Couleurs. Rouge » (1994).


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Comment avez-vous rencontré Krzysztof Kieślowski ?

Par l’intermédiaire de l’écrivaine Hanna Krall, en 1982. Le régime communiste avait instauré la loi martiale. Krzysztof était déjà un réalisateur de documentaire reconnu. J’étais un jeune avocat proche de l’opposition anticommuniste, je défendais les dirigeants de Solidarność, des personnalités exceptionnelles. Nous nous sommes retrouvés dans un de ces cafés tristes de Varsovie. Il était pessimiste sur le présent comme sur l’avenir. J’étais plus optimiste : la route était longue pour le pays, mais j’étais sûr que c’était la bonne. Le lendemain, il est venu m’emprunter La Chute d’Albert Camus, qui fut très important dans notre collaboration.

Kieslowski, pas d’explication, des mystères

Comment l’idée du Décalogue est-elle née ?

Avec une thèse claire : approchons les dix commandements comme dix indicateurs de l’expérience d’un groupe de gens dans un même espace-temps, sans interprétation théologique, mais d’une manière anthropologique, sociologique. Trouvons dix anecdotes pour les raconter. On écrivait dans la cuisine, chez lui ou chez moi. En 1987, en treize mois, Krzysztof a fini douze films : les épisodes du Décalogue et deux longs métrages, Tu ne tueras point et Brève histoire d’amour [versions longues des épisodes 5 et 6 du Décalogue, ndlr]. Je voyais combien il était épuisé, je le voyais même vieillir. En même temps, on était conscients qu’on touchait à quelque chose de grand.

Un podcast pour l’après-midi: Une balade à travers l’oeuvre de Krzysztof Kieślowski

Quel souvenir gardez-vous de lui ?

On parle beaucoup de sa subtilité, de son acuité et de son honnêteté, mais on évoque très peu son incroyable sens de l’humour qui, à mon avis, vient en ligne directe de Charlie Chaplin. Il avait aussi ce qui caractérise les grands réalisateurs : une vraie tendresse pour les gens. Dans ses films, documentaires ou de fiction, il ne juge jamais. Krzysztof n’a jamais dévié de cette route. Dans son œuvre, il n’y a pas de thèse, pas de politiquement correct ou incorrect ; il y a de l’amour, de l’honnêteté et la tentative de montrer, comme Albert Camus l’a écrit, qu’à la fin l’être humain est toujours innocent. Il a laissé derrière lui un héritage énorme.

: Ressortie en salles de La Double Vie de Véronique et de la trilogie Trois couleurs en versions restaurées 4K inédites à partir du 6 octobre, et le 2 novembre en DVD et Combo Blu-Ray / Ultra HD HDR (Potemkine Films)

: Rétrospective Krzysztof Kieślowski,  du 29 septembre au 25 octobre  à la Cinémathèque française