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Jean-Paul Belmondo est mort
- Léa André-Sarreau
- 2021-09-06
Figure incontournable de la Nouvelle Vague, avant de devenir dans les années 1980 une vedette populaire de comédies d’action où il brilla en aventurier à grande gueule, Jean-Paul Belmondo est décédé ce 6 septembre à l’âge de 88 ans, comme l’a annoncé l’AFP.
A la fois icône populaire (il a fait ses débuts devant la caméra de Marc Allégret dans Sois belle et tais-toi puis dans Un Drôle de dimanche avec Bourvil) et acteur phare de la Nouvelle Vague : Jean-Paul Belmondo n'a jamais vraiment choisi entre cinéma d'auteur et films à succès. Avant d'imposer sa gouaille et son jeu instinctif, presque animal, chez des réalisateurs tels que Marcel Carné et Philippe de Broca, celui que l'on surnomme "Bébel" a été un ado peu intéressé par l'école, amateur de sport et de théâtre - il sort diplômé du Conservatoire en 1957, aux côtés de ses camarades Jean-Pierre Marielle, Jean Rochefort ou encore Françoise Fabian.
En 1959, Claude Chabrol le choisit pour interpréter dans A double tour un jeune effronté, venu mettre la pagaille dans une famille bourgeoise. Mais c'est un an plus tard, dans A bout de souffle de Jean-Luc Godard, que son insolence légendaire explose à l'écran. En voyou libre et virevoltant, avec son rictus qui deviendra sa marque de fabrique, Belmondo impose un jeu spontané, sauvage. Il n'en faudra pas moins pour faire de lui le visage de la jeunesse des sixties et d’une nouvelle modernité cinématographique, cristallisée dans une apostrophe au spectateur restée célèbre ("Si vous n'aimez pas la mer, si vous n'aimez pas la montagne, si vous n'aimez pas la ville. allez vous faire foutre !"). On le croisera encore chez Godard en anarchiste au romantisme échevelé (Pierrot Le fou), chez Jean-Pierre Melville (Léon Morin, prêtre, Le Doulos), dans deux rôles saisissants d'ambiguïté, puis chez François Truffaut (La Sirène du Mississipi, où il est épris d'une Catherine Deneuve pleine de duplicité) et Alain Resnais (Stavisky).
Acteur en perpétuel renouvellement, Belmondo refusera pourtant de se laisser enfermer dans le cinéma de la Nouvelle Vague. Sa rencontre avec Philippe De Broca marque le début de sa carrière dans le star-system, et de ses rôles d'aventuriers qui lui collèrent tant à la peau. Avec Cartouche (1962), Belmondo est propulsé au rang de vedette, il enchaîne alors les films qui cartonnent au box-office (L'Homme de Rio) – le public goûte ses cascades non doublées, toujours plus audacieuses. Mais il surprend aussi avec des rôles plus profonds qui complexifient sa persona désinvolte - on pense aux polars inoubliables Le Solitaire de Jacques Deray et Flic ou voyou de Georges Lautner.
Sans jamais délaisser son amour des comédies populaires, qu'il enchaîna dans les années 1980 (L'As des As, Joyeuses Pâques) et qui forgèrent son image de clown (parfois triste), Belmondo resta une silhouette familière du cinéma d'auteur (Itinéraire d’un enfant gâté de Claude Lelouch en 1988 pour lequel il remporta le César du meilleur acteur, jusqu'à sa dernière apparition à l'écran dans D'un film à l'autre (2011) documentaire encore une fois signé Lelouch.