La compagnie Disney a en effet testé ces derniers mois, en accord avec six sociétés publicitaires, le « Disney Magic Words ». Basé sur l’apprentissage profond, cet outil analyse tout le contenu des services de streaming du studio, pour mieux comprendre le comportement du public vis-à-vis de ces programmes. Ces métadonnées sont ensuite recueillies, pour proposer aux spectateurs des publicités adaptées à ce qu’ils viennent de visionner. Geoffrey Calabrese, du réseau d’agence Omnicon, a ainsi déclaré fièrement que cette nouvelle technologie leur permettrait, à court terme, « de se connecter directement aux émotions du consommateur ».
Ce type d’outil est facilement transposable dans la production des grands studios américains qui, depuis des années déjà, utilisent des données démographiques et autres « focus group » pour calculer les chances de succès d’un film ou d’une série, avant d’en lancer la production. On voit donc très bien comment cette connaissance accrue du public grâce aux I.A. peut permettre de calibrer des films destinés à plaire au plus grand monde, bref à définir de façon mathématique les lois du marché.
Cette menace de l’intervention de l’I.A. dans le processus créatif est d’ailleurs si prégnante que plusieurs scénaristes, parmi lesquels Shane Black (Kiss Kiss Bang Bang) et Jim Herzfeld (Mon beau-père et moi), ont mis en place The Gauntlet. Composée d’écrivains aguerris, cette société propose aux producteurs de lire les scénarios de films en développement pour leur prodiguer leurs conseils avisés, basés sur une expérience et un ressenti très humain, très subjectif et donc garanti sans I.A.
Reste que cette course technologique pour prédire les opinions du public pourrait être vaine. Les résultats au box-office le prouvent régulièrement : le septième art reste une industrie extrêmement précaire et le public une entité volubile qui continue, fort heureusement, à rester imprévisible.
L’été 2023 l’a prouvé avec brio, avec les résultats décevants du septième Mission : Impossible et du dixième Fast & Furious qui semblaient promis au succès, tandis que les challengers Barbie et Oppenheimer triomphaient.