Corsage suit Elisabeth à un âge où le regard que la cour porte sur elle est d’une cruauté terrible, presque annihilante…
Quand on est censé être cette jeune et belle impératrice et qu’à un moment, physiquement, on ne peut juste plus assumer ce rôle, qu’est-ce que ça veut dire ? Je voulais montrer Sissi [incarnée par la géniale Vicky Krieps, ndlr] dans toute sa complexité, sans qu’elle soit toujours aimable et patiente, mais aussi comme quelqu’un qui cherche une intimité mais ne sait pas comment s’y prendre. Finalement, son véritable antagoniste, ce n’est pas son époux Franz mais l’image à laquelle elle est censée se conformer.
Justement, le film raconte le soin qu’elle accordait au paraître, qui passait notamment par son rapport à la nourriture.
Elisabeth suivait un régime très strict, ce qui n’était pas commun à l’époque. Je crois que les troubles alimentaires sont très souvent liés à l’idée de contrôle, or c’est exactement ce que Sissi opère dans son rapport à la nourriture. On pouvait l’obliger à assister aux dîners mais pas à manger, et je trouve ça assez radical de s’asseoir, de ne pas toucher à son assiette et de ne parler à personne.
Au cadre et à la photographie, comment avez-vous travaillé l’idée d’enfermement ?
Les pièces dans lesquelles Elisabeth a vécu sont vastes, très belles, mais quand on regarde par les fenêtres, on ne voit que du gris à cause de l’immense complexe de bâtiments autour. On s’y sent plus en prison que dans un château. À l’éclairage, on s’est beaucoup appuyé sur l’impression sombre et froide que ces grandes pièces devaient traduire, et au cadre sur le sentiment que Sissi devenait progressivement trop grande pour les lieux.
Corsage de Marie Kreutzer, Ad Vitam (1 h 53), sortie le 14 décembre