Si Les Hauts de Hurlevent, unique roman d’Emily Brontë, a fait l’objet de nombreuses adaptations (comme celle de Buñuel en 1954), l’histoire intrigante et romanesque de son autrice, à l’exception du film Les sœurs Brontë d’André Téchiné, a rarement été racontée. Frances O’Connor s’en empare enfin, dans un film qui embrasse la jeunesse isolée de la plus farouche des trois sœurs écrivaines, dont les talents furent calcinés par leurs morts prématurées.
Envoûtante dans ce rôle, Emma Mackey incarne cette héroïne singulière qui trouve refuge dans l’écriture et les pérégrinations au milieu de ses landes natales, avec son frère Branwell (dont l’impulsivité et les débordements seront sources d’inspiration pour les personnages de son ouvrage). A travers ses songes, l’auteure s’oppose au sérieux de ses soeurs, à la rigidité de son père et aux carcans de cette société pieuse du 19e siècle.
Dans ce microcosme ombrageux, la réalisatrice propose des plans immersifs des landes orageuses pour révéler le coté fantomatique et de l’écrivaine. Entre biopic et éléments de fiction (la liaison qu’entretien Emily avec le vicaire, portée à l’écran par une alchimie séduisante entre les acteurs, est totalement fictive), le film retrace les origines de la création d’un roman au lyrisme provocateur, à l’écriture incisive et aux personnages d’une grande cruauté. Plans ésotériques au ralenti, dialogues tranchants et gros plans sur le regard profond plein de noirceur d’Emma Mackey Mackey nous immiscent dans l’intimité de cette écrivaine dont l’ultime œuvre a été l’apogée d’une vie vécue à travers la littérature.
Emily de Frances O’Connor, 2h10, Wild Bunch, sortie le 15 mars
