La marche à suivre est désormais bien rodée pour préparer la colle : mettre de l’eau, ajouter la colle, bien mélanger, rajouter encore de l’eau. Dans les chambres, les squats, les jardins, on peint à la peinture noire des slogans sur des feuilles A4 et on les colle le soir sur les murs.
« Anonyme avait 86 ans et était atteinte d’Alzheimer, son mari l’a tuée », « Même mon chien comprend quand je lui dis non », ou encore « Mon corps, mon choix et ferme ta gueule » : simple, efficace. Ces phrases sont autant de messages qui recouvrent inlassablement les petites et grosses villes de France depuis trois ans. En baladant une caméra discrète entre une dizaine de collectifs, Marie Perennès et Simon Depardon s’invitent dans les sessions de collage mais aussi dans les discussions entre les militantes et les militants.
En captant sobrement et efficacement les récits douloureux d’agressions, de plaintes non abouties, de deuil même, mais aussi les moments de joie puissante que confère cette activité de groupe, l’empathie est immense. On comprend ce qui pousse celles et ceux qui s’acharnent plusieurs fois par semaine à coller le soir des affiches qui seront parfois déchirées dans l’heure, en prenant le risque de se faire insulter ou agresser par les passants et riverains, voire arrêter par la police : la colère. Souligné par les somptueux beats de la compositrice Uèle Lamore, Riposte féministe est un documentaire qui, à l’instar des collages, laisse une trace et contribue à détruire le patriarcat.
Riposte féministe de Marie Perennès et Simon Depardon, Wild Bunch (1 h 27), sortie le 9 novembre