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« Mémoires d’un corps brûlant » : une chronique féministe sensible et sensorielle

  • Boris Szames
  • 2024-11-18

[CRITIQUE] Lauréat du prix du public dans la section Panorama de la Berlinale 2024, « Mémoires d’un corps brûlant » explore la question du désir féminin et ses tabous, à travers différentes étapes de la vie d’une femme. Un film nécessaire qui touche à l’intime avec une rare pudeur.

Hasard de l’actualité, le deuxième long-métrage de la Costaricienne Antonella Sudasassi Furniss débarque sur les écrans deux mois après la parution du nouveau livre de Mona Chollet, Résister à la culpabilité. À l’instar de la journaliste et essayiste franco-suisse, la cinéaste interroge l’impardonnable faute d’être née femme dans une société soumise aux injonctions patriarcales. Ici, celle du Costa-Rica, l’un des derniers pays du monde à maintenir son pacte étatique avec l’Église catholique, qui continue d’inoculer le syndrome du péché originel à ses ouailles.  

Mémoires d’un corps brûlant retrace en 1h30 l’histoire d’une « femme normale », Ana (Sol Carballo), 71 ans, joyeuse divorcée et mère de famille confinée dans son appartement chargé d’un trop plein de rêves inachevés. 

C’est la chronique d’une vie par l’intime, à laquelle se superposent en voix off les témoignages de trois septuagénaires libérées du fardeau de la vie maritale et de son contrôle coercitif dans l’épuisement des gestes du quotidien. Le dispositif narratif audacieux joue sur la porosité entre ces témoignages réels et les souvenirs recomposés d’Ana par le prisme de la fiction.

Poursuivant le travail entamé avec son premier long-métrage, The Awakening of the Ants (jamais sorti en France), Antonella Sudasassi Furniss s’intéresse surtout à la sexualité de la femme mariée que consume jusqu’au troisième âge l’inextinguible feu du désir. La mise en scène théâtrale en vase clos favorise l’éclosion d’images du passé refoulées, l’appartement d’Ana se transformant tour-à-tour en parc d’attractions, salle de cinéma ou chambre d’hôpital. 

Des baisers volés de l’adolescence aux premières menstruations en passant par le plaisir de l’onanisme et la ménopause, la caméra embrasse le corps féminin dans tous ses états, avec la douceur d’une caresse. Un geste de cinéma qu’on aimerait voir plus souvent.

Mémoires d’un corps brûlant (Nour Films, 1h30), sortie le 20 novembre

Image © Nour films

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