« Mad God » de Phil Tippett : le cinéma comme thérapie

[CRITIQUE] Film d’animation image par image réalisé durant trente longues années par un grand spécialiste des effets spéciaux, « Mad God » est une déambulation cauchemardesque dans l’esprit tourmenté d’un artiste à la fois acteur et victime des mutations de son médium.


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Amoureux fou des films magiques de Georges Méliès, de Karel Zeman et de Ray Harryhausen, Phil Tippett fut l’un des grands artisans de la renaissance des effets spéciaux qui aboutit à la révolution numérique des années 1990. Déchiré entre ses amours de jeunesse et l’inévitable évolution de son art, Tippett souffrit d’une sévère dépression alors qu’il délaissait ses marionnettes pour concevoir les dinosaures numériques de Jurassic Park. Une dépression dont il s’extirpa en prenant à bras-le-corps les nouveaux outils à sa disposition (il est notamment le créateur des hordes d’aliens de Starship Troopers), mais aussi en se lançant dans un film d’animation au long cours.

Ce projet, Mad God, est donc une œuvre thérapeutique dans laquelle Tip­pett a, en totale autarcie, compilé toutes les images qui hantaient ses rêves à l’aide de techniques majoritairement pré­-numériques. C’est à la fois la force et la limite de ce film unique qui suit les déambulations d’un personnage mutique dans un grand fourre-tout post-apocalyptique. Conçu de façon erratique et sans structure narrative, Mad God est un film décousu et inégal. C’est aussi, et surtout, une œuvre habitée unique et un cri d’amour déchirant pour un cinéma d’un autre temps.

Mad God de Phil Tippett, Carlotta Films (1 h 24), sortie le 26 avril

Image (c) Carlotta Films