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Vu à la Mostra de Venise 2024 : « Joker : folie à deux » de Todd Phillips

  • David Ezan
  • 2024-09-06

[CRITIQUE] La suite du Lion d’or 2019 avait de quoi faire saliver. Présentée en grande pompe à la Mostra, vendue sur le couple formé par le Joker et une Harley Quinn campée par Lady Gaga, ce qu’on attendait comme une prolongation festive n’a finalement rien de très aimable. Et c’est tant mieux.

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Que fait Hollywood après un triomphe aussi phénoménal que le Joker premier du nom, acclamé en 2019 par critique et public en chœur ? Il capitalise évidemment. Il voudrait prolonger l’histoire, aussi loin que le succès et la lassitude des spectateurs l’autorisent.

Le concept même de Joker – ancrer une star de comics dans un contexte social réaliste – avait le mérite de remettre les compteurs à zéro, au sens narratif du terme. S’ouvrait alors un boulevard au cinéaste Todd Phillips, qu’on croyait prêt à faire du Joker sa poule aux œufs d’or ; autrement dit à cyniquement capitaliser sur un personnage qu’on dit antisystème.

Grand bien nous fasse, c’est tout l’inverse qui se produit – n’oublions pas que le Joker est un farceur. Phillips le prend au mot et agence le récit – jusqu’à son ultime scène – comme une blague, que certains fans pourraient trouver mauvaise.

Incarcéré dans une prison sordide, Arthur Fleck alias Joker (Joaquin Phoenix) est certes acclamé à l’extérieur, mais pourri de l’intérieur. Exit la flamboyance, pas même lorsqu’il rencontre une Harley Quinn (Lady Gaga) fascinée par ses crimes. Tout est pourtant mis en place pour « servir au public ce qu’il attend », tel que c’est littéralement formulé. Le tapis rouge est déroulé aux amants maudits, coiffés et maquillés sur une estrade où ils poussent la chansonnette. Et la comédie musicale endiablée de n’être qu’un fantasme illusoire, tandis que le personnage de Lady Gaga est purement et simplement relégué au second plan – c’est aussi une limite du film.

Rien de sexy dans cette Folie à deux ; contrairement au premier volet et ses envolées lyriques, le second nous remet systématiquement les pieds sur terre. En l’occurrence dans le tribunal où Arthur Fleck est jugé pour ses meurtres, car on assiste en fait à un vrai film de procès – Justine Triet aurait-elle hypnotisé Todd Phillips ?

On n’attendait pas tel parti pris de la part d’un blockbuster. C’est qu’on assiste non seulement au procès du Joker, mais à celui d’un premier volet longuement accusé de complaisance envers la violence, voire de glorification trumpiste sous couvert d’une rébellion faussement cool. Todd Phillips ne pouvait l’ignorer en écrivant Folie à deux, ne serait-ce car il y cite explicitement l’assaut du Capitole.

Enfin car il détricote le « Joker Gate » comme pour dissiper les malentendus, dans un film pas si tendre avec son personnage quasi momifié, ni avec une Amérique incapable de discerner la raison de la folie. Entre les quatre murs du tribunal, on s’interroge alors collectivement : qu’a-t-il bien pu se passer, que se passe-t-il encore pour qu’on prenne les blagues du Joker au sérieux ?

Joker : folie à deux : ce qu'en pensent les critiques sur X

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