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CANNES 2024 · « Armand » de Halfdan Ullmann Tøndel : cas d'école

  • Laura Pertuy
  • 2024-05-19

[Critique] Irrigué par un propos implacable sur les mécanismes d’acceptation sociale, le premier long métrage de Halfdan Ullmann Tøndel, en sélection Un Certain Regard, impressionne par son audace formelle et la prestation vertigineuse de Renate Reinsve.

Au sein d’une grande école délestée de ses élèves, où seule s’active une alarme incendie défectueuse, une enseignante alerte sa direction d’une potentielle situation de violence d’un élève, Armand, sur l’un de ses camarades. Les parents sont convoqués en urgence ; Elisabeth (extraordinaire Renate Reinsve), qui élève seule son fils, fait une entrée tonitruante sur place, face au couple Anders et Sarah, qui est par ailleurs la tante d’Armand. La médiation, assurée très maladroitement par le directeur de l’établissement, prend bientôt un tour qui dépasse la seule question de l’agression présumée. Le temps est à l’orage, les salles de classe étouffées de chaleur, et les adultes poussés dans leurs retranchements les plus primaires. Ce sont bien les attitudes, mimiques, premiers jeux de pouvoir et messes basses d’une cour de récréation que le film recrée autour des adultes qui composent son casting. Si les visages arrivent à l’école tendus, les corps prostrés, le regard ferme, l’incapacité des uns et des autres à affronter la situation qui touche deux enfants, cousins de surcroît, amène une extravagante relâche.

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C’est ce voyage-là, catalysé en quelques heures, qu’Armand propose, un questionnement vertigineux sur ce que l’enfant qu’on a été est devenu, sur les remparts que l’on a érigés autour de nos danses intérieures. Halfdan Ullmann Tøndel emploie les différents espaces de l’école – sa cage d’escalier à l’horrifique spirale, ses couloirs pris dans une atmosphère fantomatique – comme autant de révélateurs de cerveaux en surchauffe. On s’y perd comme on s’y libère, mais s’y révèle surtout une propension au rejet de ce qui s’exprime trop fort, de ce qui est « hors manuel ». Entière et fidèle à ses émotions, Elisabeth se révèle si humaine qu’elle en paraît extraterrestre à ceux qui l’observent. Pour traduire cette mise à l’écart d’un être par ses pairs, le cinéaste norvégien déploie des merveilles d’idées formelles, à la lisière du cinéma d’horreur, et propose un huis-clos terrifiant de vérité sur nos boussoles intimes détraquées.

Le Festival de Cannes se tiendra cette année du 14 au 25 mai 2023. Tous nos articles sur l’événement sont à suivre ici.

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