Quatre jeunes cinéastes espagnols à suivre

Cette année, le cinéma espagnol a retrouvé des couleurs sur la scène internationale. La preuve avec ces cinéastes de la nouvelle génération qui portent cette réjouissante vitalité.


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CARLA SIMÓN

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À 35 ans, elle a décroché l’Ours d’or à la Berlinale en février pour son deuxième long, Nos soleils. Un film solaire sur la pourtant cruelle mutation du monde paysan, qui prend racine dans son propre terreau familial. Carla Simón a atterri dans l’arrière-pays catalan à 6 ans, après la mort de ses parents des suites du sida. Une tragédie racontée dans son magnifique Été 93 (2017, nommé aux Oscar), l’histoire d’une fillette de la ville qui doit s’adapter à la vie à la campagne chez sa tante et son oncle. Influencée par le Néoréalisme italien et le cinéma d’, elle a forgé sa manière singulière d’aborder ses thèmes-phares (l’enfance, l’innocence et la famille) à la London Film School. Après avoir donné naissance à son premier enfant l’été dernier, elle travaille – bien sûr – de nouveau sur un souvenir familial pour son prochain script. • T. Z.

JONÁS TRUEBA

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Chez Jonás Trueba, tous les chemins mènent à Madrid. En sept films – seuls les trois derniers ont été distribués en France, dont ce mois-ci Venez voir –, le cinéaste de 41 ans, également critique et enseignant, dresse une cartographie de sa ville natale à travers des personnages qui se cherchent au diapason des rencontres. C’est, dans Eva en août, l’errance d’une trentenaire célibataire qui se réinvente à la faveur d’un été solitaire ; dans Qui à part nous, la cristallisation politique d’ados filmés sur cinq ans. Quelque part entre Richard Linklater et Éric Rohmer, le cinéma direct et la tentation du romanesque, le travail de Jonás Trueba trouve sa voie dans une forme d’improvisation maîtrisée et des mises en abyme qui nous rappellent que la fiction est une précieuse utopie collective. • L. A.-S.

Jonás Trueba : « C’est important de sentir la caméra comme une amie, une confidente »

ELENA LÓPEZ RIERA

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Elena López Riera nous magnétise avec El agua, 
son premier long hanté 
dont la sortie est prévue 
le 29 mars prochain. 
Filmé dans le village du 
Sud-Est espagnol dont elle est originaire, Orihuela, où elle a aussi tourné ses courts Pueblo et Las vísceras, il raconte l’été d’Ana, qui doit gérer une rumeur : les femmes 
de sa famille auraient « l’eau en elles ». Lorsque la rivière déborde, celles-ci seraient appelées pour y être englouties… S’appropriant les mythes qui l’ont bercée enfant, la cinéaste née en 1982, également enseignante en littérature comparée et en cinéma à Genève, explore la transmission des peurs, de la culpabilité entre des femmes de différentes générations. Et connecte avec celle d’aujourd’hui en filmant de sublimes scènes de raves, ou en interrogeant un autre héritage trop lourd à porter, celui de la crise climatique. • Q. G.

Elena López Riera : « Au-delà de la croyance, ce qui m’intéresse c’est la transmission »

ITSASO ARANA

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Dans la moiteur de l’été 2019, on l’a découverte dans Eva en août de Jonás Trueba, portrait subtil d’une trentenaire madrilène profitant de la pause estivale pour redécouvrir sa ville, vidée de ses habitants, et faire son introspection – elle incarne avec brio cette héroïne rohmérienne et a coécrit le scénario, inspiré de son vécu. Fidèle actrice de Trueba (La reconquista, sorti en 2016, mais aussi Venez voir), la lumineuse Itsaso Arana a également fondé une troupe de théâtre, La Tristura (« la tristesse », soit tout ce qu’elle ne nous inspire pas). Elle prépare actuellement Las chicas están bien, son premier long comme réalisatrice, sur quatre actrices et un écrivain se retrouvant un été dans un vieux moulin – le film devrait sortir chez nous en 2023. On a hâte de la voir se lancer dans cette arène-là. • J. L.

Illustrations : Anna Parraguette