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Archive : Gena Rowlands à propos de John Cassavetes, sa vie d’actrice et du féminisme

  • Romain Nesme
  • 2024-08-19

Lors de cet entretien réalisé avec la journaliste suédoise Stina Dabrowski dans les années 2000, la géniale actrice américaine s'est penchée sur une vie d'amour passionnée portée par le cinéma.

De Gena Rowlands, sublime actrice américaine disparue le 14 août dernier des suites de la maladie d’Alzheimer, on retient le jeu fou, ardent, illuminé, spontané. On se souvient évidemment de son rôle de femme incomprise et désemparée dans Une femme sous influence de son mari John Cassavetes (1974) ou de comédienne complètement effrayée à l'idée de vieillir sur scène dans Opening Night (1977).

Discrète, elle s’était pourtant confiée dans les années 2000 à Stina Dabrowski, une journaliste suédoise, en la recevant chez elle, dans sa maison de Californie. La séquence s’ouvre. Blond polaire éclatant, brushing impeccable.... Le rouge à lèvres assorti au foulard donne l'impression d'une femme rangée. En réalité, pas du tout. Tout au long de cet entretien intime, le féminisme combattif de l'actrice saute aux yeux.

GENA CONTRE LE PATRIARCAT

“Le seule chose que je savais en arrivant à New-York c’était que je ne voulais pas me marier, autrement cela voulait dire tout abandonner et devenir femme au foyer.” Fascinée par Bette Davis, la jeune fille originaire du Wisconsin plaque ses études à l’université et s’installe dans la big apple pour y suivre des cours de théâtre. Inscrite à la American Academy of Dramatic Arts, c’est là qu’elle rencontre celui qui deviendra ce mari dont elle ne voulait pas : John Cassavetes. “Je ne cherchais pas l’amour, je le fuyais même et j’étais furieuse quand j’ai vu John Cassavetes, je me suis dit qu'il était le plus bel homme que je n’avais jamais vu.” Elle jouait dans la pièce Dangerous Corners de J.B. Priestley. C'était en 1954. Il était venu la voir en coulisse et “c’était tout”. L’histoire était née.

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Pas question pour autant de tout sacrifier, ni de jouer des coudes pour s'imposer à Hollywood. Fidèle au cinéma indépendant, celle qui s'est illustrée également sous la direction de Woody Allen (Une autre femme, 1988) ou de Jim Jarmusch (Night on Earth, 1991) n'a jamais répondu aux sirènes du star system.

Pour avoir fréquenté le petit milieu hollywoodien, de Judy Garland à Marylin Monroe, elle s'est aperçue que ces grandes actrices n’avaient “manifestement pas l'air heureuses”. "Je crois que les femmes, partout dans le monde, portent en elle la malédiction de la perfection". À l'écran, on l'a vue grimacer, marmonner, sauter, risquer de sortir du champ à tout bout de champ - manière d'illustrer de façon spectaculaire les désastres causés par la pression qui pèse sur les femmes.

Qui se ressemble s'assemble : comme l'actrice, Cassavetes refusait le modèle étriqué du patriarcat. “C’était un homme très moderne. Il ne s’attendait jamais à ce que les gens se conforment à quelque chose qu’ils n’aient pas désiré (...) Selon lui, la société est organisée de façon à rendre les femmes folles.” Nul doute que Gena Rowlands, loin d'être une simple interprète, aura apporté une puissante étincelle au cinéma de Cassavetes.

Une femme sous influence de John Cassavetes (1974)

COUPLE GOAL

Le couple Rowlands-Cassavetes, qui a su créer des récits éruptifs, telluriques (de Shadows à Gloria en passant par Opening Night ou Une femme d'influence), a mis un gros coup de vieux au cinéma hollywoodien. Loin des studios, ils ont modernisé la manière de faire des films, à la façon Nouvelle Vague, c'est-à-dire autofinancé, en équipe réduite et avec pour lieu de tournage leur propre maison : “Tout le monde disait qu’on s’y prenait de la mauvaise manière.” Près de cinquante ans plus tard, on revoit leurs films et, subjugués par leur intensité intacte, on se dit que ce couple anticonformiste avait bien raison de suivre son intuition.

L'entretien dans son intégralité :

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