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8 livres cinéphiles à lire en novembre

  • Bernard Quiriny
  • 2024-10-30

L’heure d’hiver est arrivée, la nuit tombe tôt, c’est le moment de se caler dans un fauteuil avec un livre, pourquoi pas cinéphilique. Suivez le guide. 

Mémoires de Monica Vitti

Disparue en 2022, Monica Vitti reste l’une des figures légendaires du cinéma italien. Elle avait publié deux livres dans les années 1990, traduits aujourd’hui sous le titre Mémoires, un peu réducteur. Elle de son côté avait sous-titré le premier « autobiographie involontaire », qui sonne plus juste. Mélange de souvenirs, de confessions, d’anecdotes, ce texte aux allures de charmant fourre-tout revient sur sa jeunesse, son entrée dans l’univers du cinéma, son travail de réalisatrice, le point d’orgue étant évidemment sa rencontre avec Antonioni. Ce dernier fera d’elle une vedette avec deux films-cultes, L’avventura en 1960 et La nuit l’année suivante. « Je dois aux regards de Michelangelo mon courage », écrit-elle. « Je dois à sa confiance ma force. »

Mémoires, de Monica Vitti, traduit de l’italien par Florence Rigollet, Séguier, 276 p., 22 €

La troupe des ombres, de Jean-Luc Douin

Il y a eu beaucoup de personnages d’espionnes au cinéma, à commencer par la célébrissime X27 qu’interprète Marlene Dietrich dans le film de Josef von Sternberg. En sens inverse, des actrices ont été espionnes dans la vie, comme Marie Bell, héroïne du Grand jeu de Jacques Feyder (1934), qui pendant la guerre sera l’informatrice des renseignements français, avant d’être arrêtée par la Gestapo. Les actrices et les espionnes ont en commun de jouer un rôle, d’où la passerelle naturelle entre les deux métiers… Telle est la piste qu’explore Jean-Luc Douin dans ce livre ludique et érudit, bourré de noms - Greta Garbo, Hedy Lamarr… - et d’anecdotes, où les vedettes des années folles aux années 1960 rencontrent quelques personnages de fiction. 

La troupe des ombres, de Jean-Luc Douin, Actes Sud, 292 p., 22,50 €

Les démons et les rêves de Josef von Sternberg, de Jean Pavans

« En 1969, lors d’une séance de ciné-club à Montpellier, je vois pour la première fois, et dans une copie non sous-titrée, The Devil Is a Woman [La Femme et le Pantin en français, ndlr]. Ma fascination se conjugue avec une sensation de ne rien comprendre. » C’est ainsi qu’a commencé le compagnonnage de Jean Pavans avec Josef von Sternberg, auquel il rend hommage aujourd’hui. Ayant consacré une biographie à Marlene Dietrich, il ne pouvait qu’en venir à son pygmalion… Les démons et les rêves, à la fois essai biographique et essai sur l’œuvre, est servi par une belle érudition et assaisonné de citations de Fun in a Chinese Laundry, les mémoires du cinéaste, parus en 1966. On dit, depuis qu’Henri Langlois a sauvé les négatifs de L’Ange bleu en 1938, que les plus grands admirateurs de Sternberg sont français. C’est toujours vrai. 

Les démons et les rêves de Josef von Sternberg, de Jean Pavans, Seuil, 272 p., 23,50 €

Anatomie d’une chute, scénario commenté, de Justine Triet et Arthur Harari

 Palme d’or à Cannes en 2023, Golden Globe du meilleur film en langue étrangère, Oscar du meilleur scénario, Anatomie d’une chute n’est plus un film, c’est un phénomène, qui continue avec la publication du scénario par Justine Triet et Arthur Harari. Certains crieront à l’autocélébration, mais il s’agit d’un document fort intéressant sur les coulisses de la réalisation, et sur la distance qui sépare l’idée du résultat. « Il s’agit ici de révéler la richesse du travail d’écriture mêlé aux enjeux du tournage, expliquent les auteurs, et de donner un aperçu de cette étape de réécriture qu’est le montage. »

Y figurent les scènes non tournées ou non intégrées au montage, avec les raisons pour lesquelles elles n’ont pas été retenues : souci de concision, de cohérence, de rythme, caractérisation des personnages, etc. Une explication de texte instructive, témoignant des innombrables choix narratifs qui conduisent à une histoire définitive, facile à lire grâce à son code couleurs ingénieux. À noter : le dessin de couverture a été conçu par David Lynch himself.

Anatomie d’une chute, scénario commenté, de Justine Triet et Arthur Harari (Gallimard, 160 p., 25 €)

Mémoires interrompus, de Bertrand Tavernier

En 2020, Bertrand Tavernier s’attaque à ses mémoires. Il meurt un an plus tard sans avoir pu y mettre le point final, ni choisir un titre, ni repeigner le premier jet, touffu à souhait. En résulte un livre inachevé mais passionnant, où Tavernier retraverse sa vie par le menu : l’enfance à Lyon, son père, les premiers Cahiers du cinéma au lycée, la découverte de l’Amérique, la rencontre avec Melville, les films à sketches. Puis L’Horloger de Saint-Paul, premier chef-d’œuvre, et tout ce qui s’en suivra… Mine pour les cinéphiles, ce gros livre contient aussi quelques anecdotes mémorables, comme ce télégramme expédié à Kubrick, dont il fut l’attaché de presse dans les années 1970 : « Cher Stanley Kubrick, comme metteur en scène vous êtes un génie. Mais dans le travail quotidien, vous êtes un imbécile. »

Mémoires interrompus, de Bertrand Tavernier (Actes Sud, 544 p., 26 €)

Sonny Boy : Mémoires, d'Al Pacino

À 84 ans, le légendaire Al Pacino publie ses Mémoires, écrits avec une énergie brute. Il y livre les secrets de son enfance à East Harlem auprès d’une famille d’immigrés italiens, de ses débuts au théâtre et de ses collaborations marquantes au cinéma avec le réalisateur Francis Ford Coppola (la saga Le Parrain) et aux côtés de Robert De Niro (The Irishman de Martin Scorsese, 2019).  

Sonny Boy : Mémoires, d'Al Pacino (Seuil, 384 p., 27 €)

Le cinéma, c’est mieux que la vie, de Claude Lellouche

Dans ses films, Claude Lelouch a sublimé la vie (comme dans la fresque Toute une vie, sortie en 1974, retraçant l’histoire d’une famille de 1918 à 2000) en suivant les événements historiques et l’évolution du cinéma. Ce livre fulgurant, composé d’entretiens et de photos, revient sur soixante ans d’un cinéma populaire et profond, composé de fêtes, d’amour et de liberté. 

➤ de Claude Lelouch, Jean Ollé-Laprune et Yves Alion (Les Presses de la Cité, 632 p., 65 €)

La Circulation, de Lucrecia Martel

Cinéaste argentine engagée, Lucrecia Martel fait du cinéma un art de la circulation où sons, histoires, identités et nature s’entrelacent. Dans La Circulation, entretien, carnets et photos de tournage nous plongent dans ses œuvres, comme les dérangeants La ciénaga (2002) et La niña santa, présenté en Compétition officielle à Cannes en 2004. 

 ➤ de Lucrecia Martel, sous la direction de Luc Chessel et Amélie Galli (Les Éditions de l’Œil, 256 p., 30 €)

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