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« Sidonie au Japon » d'Elise Girard : les fantômes du passé
- Damien Leblanc
- 2024-03-14
[Critique] Racontant le voyage au Japon d’une écrivaine française n’ayant pas encore fait le deuil de son passé, Élise Girard réussit une tendre chronique sentimentale où l’éveil à soi-même passe aussi par le calme et la simplicité d’un certain cinéma d’antan.
Ancienne attachée de presse pour le cinéma de patrimoine, Élise Girard développe dans ses films une vision très personnelle où la réalité se voit sans cesse concurrencée par la fiction, les fantasmes et les fantômes du passé. Après Belleville Tokyo et Drôles d’oiseaux, la cinéaste narre cette fois le séjour au pays du Soleil levant d’une écrivaine n’écrivant plus (Isabelle Huppert) qui vient promouvoir la reparution de l’un de ses anciens livres.
D’emblée, un sentiment d’étrangeté frappe cette héroïne qui perd ses repères dans ce pays étranger et se trouve conduite de lieu en lieu par son séduisant éditeur nippon (Tsuyoshi Ihara) tandis que le souvenir de son époux décédé continue de la hanter. Avec beaucoup de délicatesse, Élise Girard excelle à décrire l’état d’esprit dans lequel se trouve une artiste désorientée pour qui le passé se révèle si présent qu’il en devient paralysant. Et c’est grâce à une mise en scène délicieusement surannée (les apparitions du fantôme du mari, joué par August Diehl, rappellent le classicisme apaisé de L’Aventure de Mme Muir de Joseph L. Mankiewicz) que cette charmante fable située dans un Japon silencieux et lumineux parvient à faire progressivement passer son héroïne d’une triste mélancolie à un romantisme vivifiant.
Sidonie au Japon d’Élise Girard, Art House (1 h 35), sortie le 3 avril.