À travers ce périple de la Namibie à Medellín, en Colombie, ce film hybride retrace le destin extraordinaire de cet hippopotame, surnommé Pepe, extirpé clandestinement de son environnement naturel pour répondre aux extravagances du célèbre narcotrafiquant Pablo Escobar. En donnant la parole à cet animal martyr, Pepe ressuscite son fantôme qui, de sa voix sépulcrale, confie son dépaysement et exprime aussi sa colère contre les hommes, qu’il nomme « les deux pieds »…
Pour composer ce récit épique et polyglotte (afrikaans, espagnol, allemand), la mise en scène s’organise de façon organique autour d’une esthétique ample, hétérogène, s’aventurant à la lisière de la fiction, du documentaire et de l’expérimental. Comme ces échappées plastiques, qui font alterner des plans en couleur du safari, une rivière filmée avec un drone et l’imposante silhouette du mammifère captée la nuit en infrarouge. Au fil de ce voyage fantasque, le réalisateur Nelson Carlo de los Santos Arias interroge subtilement les spectres du colonialisme et de l’ethnocentrisme, thèmes déjà abordés dans son précédent long métrage, Cocote (sorti en 2018), récompensé au festival de Locarno. Avec Pepe, le cinéaste dominicain signe un pamphlet fascinant, à la poésie iconoclaste.
Pepe, sortie le 1er janvier de Nelson Carlo de los Santos Arias, Shellac (2 h 02)