Dans cette comédie osée, le cinéaste néo-zélandais Taika Waititi (Thor. Ragnarok, 2017) nous projette dans la tête et les fantasmes d’un enfant allemand enrôlé dans les Jeunesses hitlériennes et revisite, au passage, le film de guerre.
À 10 ans, le très vif Jojo (joué par l’excellent Roman Griffin Davis) grandit dans l’Allemagne nazie aux côtés de sa mère, Rosie (Scarlett Johansson), alors que son père s’est volatilisé sans qu’il ait vraiment compris pourquoi. Sensible à la verve haineuse des jeunesses hitlériennes, le petit garçon s’invente un ami imaginaire, et pas n’importe lequel : un Adolf Hitler cartoonesque (campé par un drôlissime Taika Waititi, présent sur tous les fronts). Droit dans ses bottines, ses certitudes en prennent un coup quand il rencontre Elsa (la révélation Thomasin McKenzie), une jeune fille juive qu’il découvre cachée chez lui… Comment grandir dans l’enfer de la guerre ? C’est tout l’enjeu de ce récit audacieux, qui prend le parti d’observer la violence délirante du monde à travers le regard d’un enfant se réfugiant dans la fiction, au son de hits des Beatles et de David Bowie chantés en allemand. Avec une minutie de mise en scène et un sens de l’absurde qui évoquent le cinéma de Wes Anderson, Taika Waititi place souvent sa caméra à hauteur d’enfant pour nous emporter dans cette proposition cinématographique qui tranche avec la tradition des films de guerre versant dans le drame pur. Sans frilosité, il prend à la lettre les théories et les discours hitlériens qui émaillent le film pour s’en moquer et en démontrer la profonde bêtise (comme dans cette séquence où des nazis tentent d’apprendre à prononcer correctement « Heil Hitler! »). Un pari risqué, mais réussi haut la main.
Jojo Rabbit de Taika Waititi, Walt Disney (1 h 48), sortie le 29 janvier
Image: Copyright 2019 Twentieth Century Fox