Malgré la tournée américaine de son spectacle de Noël A John Waters Christmas – It’s a Yuletide Massacre et la préparation de son premier roman Liarmouth – à paraître en mai 2022 –, John Waters, en bon cinéphile qui se respecte, a tout de même trouvé le temps de composer le top de ses films préférés de l’année. Une sélection de dix films, rapportée par le magazine ArtForum, qui témoigne une fois de plus des goûts pointus du réalisateur de Pink Flamingos.
Annette de Leos Carax
Le meilleur film de l’année selon John Waters n’est nul autre que le dernier opus du trop rare Leos Carax, Annette. Porté par Adam Driver et Marion Cotillard et rythmé par les compositions des Sparks, cet opéra-baroque a su convaincre le cinéaste par son côté over the top et sa folie inhérente. John Waters tient cependant à mettre en garde les spectateurs : « Allez-y tout seul pour que personne ne puisse vous gâcher ce chef-d’œuvre de cinglé. Et oui, c’est très long. »
Summer of Soul (…Or, When the Revolution Could Not Be Televised) de Ahmir « Questlove » Thompson
Invisible en France pour le moment, ce documentaire revient sur l’histoire du Harlem Cultural Festival qui s’est tenu en 1969, en parallèle du Festival de Woodstock. Une chronique fiévreuse d’un concert d’anthologie, mené par les performances dantesques des légendes de la soul, dont Nina Simone, B.B. King et Clara Ward. Le cinéaste en est apparemment sorti tout retourné.
Vortex de Gaspar Noé
Il faudra encore patienter quelques mois pour découvrir le prochain long de Gaspar Noé, que Waters décrit comme « le drame sur la mort le plus humain et le moins ironique, mais aussi le plus effrayant et le plus claustrophobe jamais réalisé ». Marqué par l’utilisation terrassante du split-screen, le cinéaste laisse entendre qu’il faudra s’accrocher encore plus avant pour faire face à la puissance déstabilisante du film.
France de Bruno Dumont
Ce n’est pas la première fois que John Waters cite un film de Dumont parmi ses préférés de l’année – en 2019, déjà, Jeanne traînait en bonne position de son top. Voilà qu’il remet le couvert en citant France, cette satire singulière du milieu politico-médiatique portée par Léa Seydoux dans le rôle de la journaliste bourgeoise France De Meurs. Un ton abrasif qui a tout de suite plu au cinéaste iconoclaste et irrévérencieux.
The Most Beautiful Boy in the World de Kristina Lindström et Kristian Petri
Présenté en compétition lors de la le documentaire des réalisateurs suédois Kristina Lindström et Kristian Petri analyse le parcours accidenté de l’acteur Bjorn Andresen, jeune vedette du Mort à Venise de Luchino Visconti. Pour John Waters, le film explore avec justesse les dangers de la célébrité précoce.
Mandibules de Quentin Dupieux
Pour le cinéaste, « le film indépendant le plus stupide de l’année est aussi l’un des plus drôles et des plus charmants ». C’est un fait, John Waters a adoré la nouvelle fantaisie de Quentin Dupieux, qu’il place en très bonne position dans son top. On est prêts à parier qu’il a aussi adoré Wrong Cops (2013) sa comédie loufoque sur des policiers écervelés et sans morale.
Red Rocket de Sean Baker
Quoi de plus naturel pour un personnage tel que John Waters que de célébrer un film évoquant les pérégrinations d’un ancien acteur porno désireux de relancer sa carrière ? C’est chose faite avec Red Rocket, un film qui marque selon lui le retour « du sexe, du combat et de la nudité frontale sur un écran d’art et d’essai, soit exactement là où ils doivent être ».
The Tragedy of Macbeth de Joel Coen
Pari gagné pour le film de Joel Coen, bientôt disponible sur Apple TV+, que John Waters compare carrément au cinéma d’Ingmar Bergman : « Si Ingmar Bergman revenait d’outre-tombe aujourd’hui pour mettre en scène Shakespeare au cinéma, voici à quoi cela ressemblerait. » Voilà de quoi donner relancer les plus plus impatients d’entre nous.
Saint-Narcisse de Bruce LaBruce
Sur les dernières marches du top, on retrouve l’icône queer Bruce LaBruce et son subversif Saint-Narcisse, qui revient sur la question du double (le protagoniste apprend qu’il a un frère jumeau siamois dont il a été séparé à la naissance) et du désir que l’on peut éprouver pour sa propre image. Un film « catholique, sexy, et aussi déviant que dévôt ».
The Onania Club de Tom Six
Même si John Waters semble avoir adoré Madres Paralelas, le drame sur la maternité de Pedro Almodovar, il ne peut résister à l’impérieuse envie d’aller à rebours du consensus général. En effet – et il le dit lui-même -, son goût pour le trash et le politiquement incorrect l’ont amené à clôturer ce top par le dernier opus du réalisateur néerlandais de The Human Centipede. Au programme : un groupe de femmes riches qui s’adonnent aux joies de l’onanisme devant le journal télévisé, porteur des tragiques nouvelles du monde. Un film résolument effronté, apparemment rejeté par les distributeurs internationaux : « Vous ne serez peut-être jamais en mesure de le voir en salles. Peut-être que c’est une bonne chose…. »
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