Malcolm McDowell se confie sur la scène de torture d' »Orange Mécanique »

Stanley Kubrick a exigé que l’acteur garde les yeux ouverts durant cette séquence de lobotomisation, ce qui lui a fait perdre temporairement la vue.


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Beaucoup d’acteurs qui ont travaillé avec Stanley Kubrick s’accordent à dire que le cinéaste n’était pas un tendre – pour lui, les comédiens étaient des enfants gâtés, comme le rappelle si bien R. Lee Ermey (l’acteur, disparu en 2018, a incarné le glaçant sergent Hartman dans Full Metal Jacket) dans cet article de Libération.

L’exemple le plus frappant reste sans doute celui de Malcolm McDowell, protagoniste d’Orange Mécanique (1971). Dans ce cauchemar futuriste, habitée par la question du bien et du mal, l’acteur interprète Alex, un jeune chef de bande sadique qui, après avoir été emprisonné, devient le cobaye d’une expérience scientifique destinée à endiguer la criminalité en lobotomisant ses sujets.

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Avec un tel sujet, on se doutait que le tournage n’avait pas du être un long fleuve tranquille. Malcolm McDowell l’a confirmé dans une interview au NME, à l’occasion d’une réédition du film culte, qui fête son 50e anniversaire. Sachez que la scène de torture durant laquelle Alex subit le traitement Ludovico – on le force à regarder pendant des heures des images violentes en lui maintenant les yeux ouverts – n’a pas traumatisé que le personnage.

Stanley Kubrick a exigé que l’acteur garde réellement les yeux ouverts durant les prises, et le médecin présent dans la scène est un véritable pro, chargé de verser à McDowell une solution saline pour lui hydrater les yeux.

La scène a provoqué chez l’acteur une cécité temporaire et une blessure de la cornée à cause des pinces en métal : « L’un des électriciens m’a dit : « Il essaie de te tuer, Malc, il essaie de te tuer. [Kubrick] était un maniaque du contrôle, sans aucun doute, sur tout. Il m’a montré une photo de l’opération et j’ai fait, ‘Oh ouais ? Wow’.»

Le réalisateur a ensuite enjoint l’acteur à faire une opération de l’œil, à laquelle McDowell était évidemment réfractaire. Prévoyant la crainte que cela pouvait susciter chez ce dernier, Kubrick a donc fait venir un ophtalmologiste de Moorfields, un hôpital de Londres. Se sentant acculé, l’interprète d’Alex a accepté l’opération.

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Comble de l’histoire : une semaine plus tard, Kubrick a réclamé un nouveau gros plan sur l’œil de McDowell, forçant l’acteur à se faire gratter la cornée une seconde fois, sous prétexte que les yeux de la doublure ne correspondraient pas. « Pendant les dix ans qui ont suivi, je lui en voulais », a déclaré McDowell. « J’en étais malade. Je ne voulais pas en parler, j’en avais fini avec ça. Je me suis dit : ‘Écoutez, je suis un acteur, j’ai pu jouer un grand rôle, je vais de l’avant’. Puis j’ai réalisé que c’était un chef-d’œuvre, et que j’en faisais vraiment partie. Autant l’accepter et l’apprécier.»

C’est ce qu’on appelle ne pas être rancunier, surtout lorsqu’on sait que l’acteur s’est également brisé plusieurs côtes lors de la scène d’humiliation sur la scène de théâtre.