Drive My Car de Ryūsuke Hamaguchi (2021)
En adaptant un extrait du recueil de nouvelles Des hommes sans femmes de Haruki Murakami, Hamaguchi réalise un film que l’on peut qualifier de parfait. Le dispositif est simple : une Saab rouge, avec à l’intérieur Ysuke, un metteur en scène de théâtre endeuillé, et Misaki, la conductrice qui le mène aux répétitions de la pièce qu’il est en train de monter. Au fil de leurs allers-retours à Hiroshima, leurs échanges deviennent plus intimes et bouleversants. Comme dans Oncle Vania, la pièce de Tchekhov qu’Ysuke répète inlassablement, il est question d’amour, de deuil et de désarroi existentiel. On se laisse emporter par la grâce du film, chef d’œuvre du réalisateur de Senses et Asako I&II.
« Drive My Car » : le jeu fascinant de Ryūsuke Hamaguchi
La Liste de Schindler de Steven Spielberg (1993)
La sortie ce mois-ci au cinéma du dernier film en date de Steven Spielberg, l’autobiographique The Fabelmans, donne envie de se replonger dans la filmographie du maitre. E.T, Les Dents de la mer, Rencontre du 3ème type, le choix est vaste… Revoir La Liste de Schindler 30 ans après sa sortie, débarrassé de sa pesante aura de chef d’œuvre, permet d’en saisir toute la dimension personnelle, la sophistication et la portée. Spielberg y raconte l’histoire vraie d’Oskar Schindler, un industriel nazi ambigu. Profiteur de guerre, il finira par dilapider sa fortune pour sauver les Juifs qui travaillaient pour lui. Radical, entêtant, d’une puissance émotionnelle inouïe.
Steven Spielberg a casté Bradley Cooper pour son prochain film
À nos amours de Maurice Pialat (1983)
Le film s’ouvre sur des jeunes filles qui répètent une pièce d’Alfred de Musset, On ne badine pas avec l’amour. Alors qu’on se demande si l’on est vraiment devant un film de Pialat, Suzanne (Sandrine Bonnaire) lâche soudainement Musset pour plonger dans la mer. Pialat chronique les errements de l’adolescente tiraillée entre ses deux parents, de Hyères à Paris. Elle se perd d’aventure sexuelle en aventure sexuelle sans jamais trouver l’amour car, dit-elle, elle a le cœur sec et pense trop à son père. Elle finira par l’abandonner à l’obscurité, radieuse. Une actrice est née. À nos amours est l’un des plus beaux films sur l’adolescence, et un condensé du cinéma de Pialat, entre tendresse et violence. À voir absolument.
À nos amours de Maurice Pialat
Le Lion volatil d’Agnès Varda (2003)
Y a-t-il de petits films d’Agnès Varda ? Non, car même ses films courts sont de grands films. Le Lion volatil ne dure que 12 minutes, c’est une histoire d’amour, de disparition et de réapparition qui se joue à trois : Clarisse, une apprentie voyante (Julie Depardieu), Lazare, un employé aux catacombes de Paris et… le lion de Belfort, en bronze donc, trônant sur la place Denfert-Rochereau à Paris. Presque rien ne se passe, les voitures tournent autour d’eux, des passants flânent et un chat « en poil et en os » aussi. Presque rien, mais c’est sublime. Comment fait-elle ?
Dispo sur MK2 CURIOSITY (à partir du 9 février)
RÉCIT: Une journée avec Agnès Varda
The Last of Us de Craig Mazin (série, 2023)
La série est une adaptation d’un jeu vidéo culte, elle a été créée par Craig Mazin (Tchernobyl) et produite par HBO. Il y est question d’épidémie, d’humanité réduite à l’état de zombies. On suit les aventures de Joel, un quinqua endeuillé, et d’une adolescente qui semble immunisée. Rien de fou ou de novateur à première vue, jusqu’à l’épisode 3, diffusé fin janvier. La toile s’est enflammée car l’épisode dévie de sa dimension programmatique et révèle une ambition nouvelle en suivant sur 20 ans la romance entre Bill, un survivaliste, et Franck, un homme qu’il accueille à contrecoeur dans son bunker. Un peu d’amour post apocalyptique, ça fait du bien (vu qu’on en est proches).
Le showrunner de « Chernobyl » va adapter le jeu vidéo « The Last of Us » en série pour HBO
Spring Breakers d’Harmony Korine (2012)
Une colorimétrie saturée, des héroïnes pop, mais attention on n’est pas du tout chez Disney … En suivant la dérive de quatre gamines du Midwest obsédées par le fric jusqu’à l’antichambre de l’enfer (un spring break débridé en Floride), Harmony Korine signe un trip hallucinatoire à la démesure de toute la vulgarité de la pop culture des années 2000. C’est bourré de sexe, de drogues, de mauvais goût clinquant et c’est génial. A la fois ludique et dévastateur, Spring Breakers révèle, dans l’accumulation de ses plans sublimes à la vacuité assumée, un nihilisme radical.
Sans Harmony Korine et sans le cast original… Une suite de Spring Breakers en série