« Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait » d’Emmanuel Mouret : un fougueux conte philosophique

Fresque contemporaine qui entrecroise plusieurs histoires sentimentales, le dixième film d’Emmanuel Mouret, à revoir sur Arte ce mercredi 9 novembre, à 20h50, fait des désirs contradictoires de ses personna­ges la matière d’un fougueux conte philosophique.


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Fresque contemporaine qui entrecroise plusieurs histoires sentimentales, le dixième film d’Emmanuel Mouret fait des désirs contradictoires de ses personna­ges la matière d’un fougueux conte philosophique.

Jeune femme enceinte, Daphné (Camélia Jordana) se retrouve seule à la campagne pendant quatre jours avec Maxime (Niels Schneider), le cousin de son compagnon, ce dernier ayant dû s’absenter. Les deux inconnus vont se raconter leurs histoires d’amour présentes et passées d’où émergent de nombreux protagonistes aux passions contrastées.

Après Mademoiselle de Joncquières, Emmanuel Mouret s’intéresse de nouveau aux inconstances du cœur, mais au film en costumes adapté de Diderot succède une intrigue située dans un cadre contemporain qui multiplie les allers-retours temporels et les personnages. Le cinéaste se révèle particulièrement à l’aise dans cette construction romanesque où la parole dévoile toujours des doubles fonds et des passions contradictoires. Au cœur d’un cocon esthétique rythmé par les musiques de Mozart, Purcell ou Tchaïkovski, les conflits intérieurs se révèlent en effet souvent cruels, et la quête du bonheur amoureux s’accompagne parfois de vertigineuses déceptions et manipulations…

Le savoureux casting donne chair à cette foule sentimentale agitée par diverses impulsions corporelles : l’intensité renfermée de Niels Schneider, les aspirations libératrices de Camélia Jordana, la colère cachée d’Émilie Dequenne, la trompeuse maturité de Vincent Macaigne ou la sympathie ambivalente de Guillaume Gouix forment autant de tempêtes intimes sublimées par la mise en scène. Si l’usage des mots croyait pouvoir dispenser les protagonistes de tourments trop vifs, cette imbrication des désirs finit par faire surgir une émotion débordante qui déjoue magistralement les attentes et les conventions.

3 QUESTIONS À EMMANUEL MOURET

C’est votre film le plus long. Et le plus ambitieux, narrativement ?

Il y avait en tout cas l’idée de mettre en œuvre beaucoup de récits qui convergent vers une seule fin. Je voulais quelque chose d’« hyper narratif », avec une structure ludique. Et il s’est avéré que ce qui est ludique au cinéma est aussi ce qui est complexe.

Parlez-nous de votre utilisation de la musique classique pour la B.O.

La diversité des compositeurs me semble correspondre à la variété des intrigues. Et on finit par du Chopin, ce qui correspond bien au titre du film, qui n’est pas à prononcer de façon moralisante. C’est même tout l’inverse : une tendre indulgence à l’égard de notre inconstance…

Avez-vous l’ambition de faire un cinéma atemporel ?

On parle souvent du cinéma comme d’une radioscopie de l’actualité, mais ce qui nous intéresse dans la cinéphilie est aussi la rencontre entre l’actuel et l’inactuel. C’est ce qui me plaît chez un Lubitsch. Et je voulais débarrasser le film d’éléments trop contemporains pouvant parasiter l’imaginaire du public.

: Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait d’Emmanuel Mouret, Pyramide (2 h 02), sortie le 16 septembre

Images : © Moby Dick Films