« Neptune Frost » : chants libres

[CRITIQUE] Avec « Neptune Frost », Saul Williams et Anisia Uzeyman réalisent une comédie musicale afrofuturiste et onirique, greffant leurs questionnements queer et post-coloniaux à cette dystopie cyberpunk aux pays des mines de coltan.


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Révélé par le film Slam de Marc Levin (Caméra d’or en 1998), le poète, musicien et acteur américain Saul Williams réalise ici son premier long métrage en compagnie de l’actrice, dramaturge et réalisatrice française d’origine rwandaise Anisia Uzeyman. Neptune Frost raconte la rencontre amoureuse entre Matalusa, un mineur échappé d’une mine de coltan au Burundi, et Neptune, un·e hackeur·se intersexe fuyant les violences sexuelles.

 Dans une dictature policière et technologique, ils organisent avec un groupe de hackeurs la revanche du continent africain sur les pouvoirs oppresseurs (le colonialisme, les GAFAM, les puissants corrompus), grâce à une reconfiguration magique – spiritualiste – des réseaux virtuels.

Avec sa structure éclatée et son esthétique cyberpunk bricolée recyclant les déchets électroniques en d’étonnants décors, Neptune Frost développe les thématiques des chansons de Saul Williams (« Matalusa » est la version africaine de « Martyr Loser King », un titre inspiré par Martin Luther King), fusionnant modernité et traditions pour dénoncer la violence de l’industrie extractive, défendre le droit à la différence, et connecter les rythmes de tous les révoltés dans une même quête de bonheur. À l’instar des héros d’Un chant d’amour de Genet, Joe et William créent leur propre espace de liberté.

: Neptune Frost de Saul Williams et Anisia Uzeyman, Damned (1 h 45), sortie le 10 mai