« Le Grand Mouvement » de Kiro Russo : pulsations boliviennes

Trois ouvriers enchaînent les petits boulots sur les marchés de La Paz, capitale de la Bolivie. De cette sève documentaire découle une rêverie fiévreuse et éruptive, qui transforme la ville en un terrain de jeu mystique.


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Avec de nombreux zooms en contre-plongée sur la capitale administrative la plus haute du monde, le trajet du Grand Mouvement nous est régulièrement rappelé : en suivant l’errance d’un trio d’ouvriers dans les rues de la ville, il s’agit de capter la substance chaotique d’un monde animé de dynamiques et de flux insaisissables.

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L’intrigue tient en quelques mots (l’un des ouvriers tombe malade, puis consulte un sorcier), car le principal n’est pas là. C’est par ses nombreux effets et son découpage frénétique que le deuxième long métrage de Kiro Russo retranscrit un affrontement ancestral entre le visible et l’invisible, entre le monde matériel des hommes, régi par l’argent, et une cosmogonie spirituelle ouvrant sur un abîme.

Le déploiement du mouvement à travers les plans guide en profondeur ce film d’esthète, dans lequel de nombreuses surimpressions entrelacent figures et motifs pour donner à voir le jaillissement et le transfert de l’énergie vitale à travers le temps et l’espace, jusqu’à l’épuisement de corps pris d’une fièvre délirante. Revendiquant l’influence de L’Homme à la caméra de Dziga Vertov, Russo, en un peu moins d’une heure trente, livre un petit manifeste de montage, au gré d’une symphonie urbaine pour le moins électrisante.

Le Grand Mouvement de Kiro Russo, Survivance (1 h 25), sortie le 30 mars.

Images: © Altamar Films