À quel âge as-tu décidé de devenir comédienne ?
Au départ, je voulais être chirurgienne. Quand j’étais au lycée, j’ai passé un casting, que je n’ai pas eu, mais j’avais adoré le processus, déjà parce que je quittais la campagne – j’habitais dans l’Allier – pour aller seule avec ma maman à Paris.
Cela t’a donné envie de continuer ?
Oui, j’ai demandé à ma maman de m’aider à trouver un agent. Une personne a accepté de m’inscrire dans son agence une fois que j’aurais mon bac. Le temps a passé et j’ai un peu oublié cette histoire. Je suis allée en fac de médecine, mais j’ai raté ma première année. J’ai recontacté l’agent, j’ai réussi mon premier casting pour le film Kandisha [réalisé par Julien Maury et Alexandre Bustillo, et sorti en V.o.D. en juillet 2021, ndlr]. À la rentrée suivante, je suis retournée en première année de médecine, je voulais absolument réussir le concours, que j’ai obtenu en kiné, mais je n’y suis pas allée, j’ai enchaîné les tournages.
Qu’est-ce qui t’a plu à la lecture du scénario de la série L’Opéra ?
La complexité de mon personnage, Flora. Et puis le fait qu’elle soit une jeune danseuse noire – j’ai vécu cette situation dans ma petite école de danse à la campagne. De la voir représentée, reconnue et écrite sur le papier, ça fait du bien. C’était la première fois que je lisais un texte qui résonnait autant en moi. Dans la saison 2 de L’Opéra, on traite aussi du harcèlement moral, on comprend qu’il faut faire circuler la parole sur ces sujets pour que les choses évoluent.
Tu as rencontré la même problématique que Flora en tant que comédienne ?
Pour certains castings, il est parfois précisé que le rôle est pour une actrice blanche, et ça c’est assez douloureux. Mon agent m’envoie sur des castings sans distinction d’identité, d’origine, et ça fait mal quand on a des refus parce qu’on est noire. Après, sur un tournage, une fois que j’ai été choisie, je ne pense pas avoir été victime de racisme sur un plateau. Et j’espère que cela n’arrivera pas.
Flora est un personnage très fort, qui se bat, elle ne s’excuse pas d’être là, danseuse à l’Opéra de Paris. Est-ce que tu lui ressembles ?
Elle m’impressionne beaucoup et je suis très fière de l’incarner. Elle m’a donné de l’assurance et de la confiance en moi. Avant, j’avais ce truc de très bonne élève, de rester « à ma place ». Flora n’est pas comme ça, elle se bat contre les injustices, et aujourd’hui je lui ressemble davantage.
Est-ce toi qui danses dans le film, ou as-tu une doublure ?
Ça dépend des scènes et des plans, mais pour chaque saison j’ai eu une grosse préparation physique. Mes doublures ont eu des parcours identiques à celles de Flora. Leur expérience a été précieuse.
Cette manière de travailler avec des danseurs et danseuses pro, ça t’a plu ?
Oui ! J’ai passé beaucoup de temps avec les « vrais » danseurs qui jouent dans la série. Je les voyais vivre, se déplacer, manger, comment ils tournaient la tête. Je n’ai pas eu beaucoup de recherches à faire, c’était une chance, tout était autour de moi.
Quels sont tes projets pour la suite ?
Le prochain film de Yórgos Lánthimos [Poor Things, dont la sortie est prévue en 2022, ndlr], avec Emma Stone et William Dafoe. Je suis également à l’affiche du prochain film d’Anthony Chen, Drift, et dans un court métrage avec Isabelle Adjani dont le tournage s’étale sur plusieurs mois.
L’Opéra, sur OCS
PROPOS RECUEILLIS PAR ALICE (AVEC CÉCILE ROSEVAIGUE)
Photographie : Ines Ferhat pour TROISCOULEURS
Image (c) Victoria Production (Newen France) – Orange Studio – 20