« Elaha » de Milena Aboyan : ceci est mon corps

[CRITIQUE] Avec son premier long métrage, Milena Aboyan esquisse le portrait délicat d’une jeune femme déchirée entre son désir de liberté et son héritage familial. Un récit tout en nuance, à la violence contenue, dans lequel éclôt une interprète stupéfiante : Bayan Layla.


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Pour la cinéaste, tout commence par la découverte d’un médicament supposé miracle : VirginaCare. Commercialisées en Allemagne en 2015, ces capsules de faux sang pensées comme des hymens artificiels ont été conçues pour aider les femmes à simuler leur virginité lors d’un rapport sexuel. Tous les espoirs d’Elaha, jeune femme germano-kurde de 22 ans qui, à l’approche de son mariage, cherche à faire reconstruire son hymen à tout prix pour éviter le déshonneur de sa famille, semblent reposer dans ce produit.

De cette histoire très intime, la réalisatrice tire une réflexion plus universelle et pointe du doigt le contrôle systématique de la société patriarcale sur le corps des femmes. Privilégiant la subtilité à l’effusion des sentiments, elle pose un regard bienveillant et affûté sur ses personnages, évitant ainsi la simplification manichéenne et moralisatrice. La cinéaste expose avec finesse la complexité de la situation dans laquelle se trouve Elaha, déchirée entre son désir d’émancipation et son attachement profond à sa famille, grâce à des seconds rôles soignés qui donnent davantage de crédibilité au récit. Mais dans Elaha, c’est avant l’interprétation mélancolique de Bayan Layla qui captive, faisant définitivement d’elle une future star.

Elaha de Milena Aboyan, sortie le 7 février, Wayna Pitch, 1h50

Image (c) Wayna Pitch