mk2 Curiosity / Le cinéma en version très originale
Clelia, Turinoise installée à Rome depuis plusieurs années, revient sur ses terres natales pour ouvrir un magasin de vêtements. Rosetta, sa voisine de chambre, a tenté de mettre fin à ses jours. Clelia se retrouve alors au centre du bouillonnant groupe d’amis de cette dernière.
Le cinéaste italien affiche une réelle obsession pour le suicide, qu’il a frontalement abordé deux ans auparavant dans le film à sketches L’Amour à la ville (dans lequel on retrouvait notamment les réalisateurs Federico Fellini ou Dino Risi). Dans le segment intitulé Tentative de suicide, il filmait déjà plusieurs jeunes femmes racontant comment l’amour les a conduit à vouloir mettre fin à leurs jours.
Antonioni sonde les rapports et les contradictions qui opèrent au sein du groupe turinois, symbole de la bourgeoisie du nord de l’Italie. Il dresse un portrait assez peu reluisant de ces individus coupés des réalités sociales. Le réalisateur italien s’attache toutefois à donner une représentation de la femme qui s’écarte de celle de l’épouse traditionnelle et des nombreux stéréotypes qui pullulent dans le cinéma italien de l’époque.
Dans cet Antonioni, la femme est puissante et émancipée. Que ce soit Clelia qui porte la culotte dans sa relation amoureuse avec l’assistant de l’architecte qui s’occupe des travaux de son magasin, ou Momina, qui multiplie les amants tant que son mari n’est pas à la maison. Sous la caméra du réalisateur italien, l’homme est lâche, arrogant, manipulateur. Lorenzo, l’un des membres de ce groupe d’amis, concentre tous ces défauts. Jaloux du succès artistique de sa femme Nene, il la trompe avec Rosetta en lui promettant la lune. C’est la découverte de ces fausses promesses qui pousse cette dernière à commettre l’irréparable.
En brossant le portrait de femmes complexes et fortes, Antonioni apparaît comme un précurseur. Il faudra attendre les années 1970 pour voir émerger un regard proprement féminin en Italie, portés par des réalisatrices comme Lina Wertmüller, Adriana Monti et Liliana Cavani. Un élan freiné au début des années 1990 avec l’arrivée au pouvoir d’un certain Silvio Berlusconi.
Au programme également : On vous propose aussi de découvrir deux courts métrages de Justine Triet, Sur place (2006) et Vilaine fille mauvais garçon (2012), à l’occasion de la sortie de sa Palme d’or Anatomie d’une chute. Profitez également de notre Série cinéma du moment avec On vous parle du Brésil : tortures (1969) de Chris Marker, qui revient sur les exactions de la dictature dans les années 1970. Et découvrez l’envers du décor de l’Opéra de Paris avec le documentaire consacré à la danseuse étoile Aurélie Dupont, signé Cédric Klapisch.