Il est vêtu d’un blazer en velours lorsqu’on le rencontre, parure digne d’un Dracula version Christopher Lee. Accoutrement qui dit l’esprit décalé du cinéaste Romain de Saint-Blanquat, qui conjugue dans son film adolescence et vampirisme. « Les jeunes vampires me touchent beaucoup, car ils sont prisonniers d’un corps et d’un âge qui n’est pas le leur », confie-t-il en regard d’un ado vampire croisé par son héroïne, le temps d’une nuit de 1967 où elle « fait le mur » pour participer à une fête costumée.
La citation colle étrangement à cet « obsessionnel » des années 1960 et 1970 : « Cette période m’a façonné » nous répète le cinéaste pourtant né en 1987, mais marqué par Phantom of the Paradise (1974), à tel point que la voix du mythique Paul Williams se retrouve au générique de La Morsure.
L’affiche du chef-d’œuvre punk signé Brian De Palma tapissait déjà le décor d’un court métrage, Pin Ups (2014), entrecoupé par les grésillements d’une platine vinyle. « Dans les deux films, j’ai voulu capter les rituels de l’adolescence, leur aspect parfois mystique », nous explique-t-il, tandis qu’aux vinyles se sont ici substitués un pendule et autres curiosités occultes.
Fétichiste biberonné à la littérature gothique et aux « cinéastes cinéphiles », Romain de Saint-Blanquat incarne ses obsessions très concrètement ; il fut d’ailleurs accessoiriste de plateau. Le tout avec une exigence de « premier degré » qui recoupe à merveille le romantisme de La Morsure : « Prendre au premier degré le regard des adolescents, c’est aussi prendre au premier degré le fantastique. » Noble mantra pour ce vampire de cinéma, qui voit dans l’échappée de son héroïne un parallèle avec son parcours : « Faire un film, c’est se poser la question : est-ce qu’on reste cinéphile ou est-ce qu’on se projette de l’autre côté ? »
La Morsure de Romain de Saint-Blanquat, KMBO (1 h 27), sortie le 15 mai
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