Au cœur de l’univers sentimental et romanesque de François Truffaut réside son obsession pour ses héroïnes-actrices. Parmi les plus mythiques, Jeanne Moreau dans Jules et Jim (1962), Isabelle Adjani dans L’Histoire d’Adèle H. (1975), Catherine Deneuve dans Le Dernier Métro (1980). Cette nouvelle rétrospective présente d’autres actrices interprétant cinq héroïnes, issues de films plus méconnus : Françoise Dorléac en hôtesse de l’air intrépide dans La Peau douce (1964) ; Stacey Tendeter et Kika Markham prises dans un triangle amoureux au début du xxe siècle dans Les Deux Anglaises et le Continent (1971) ; Fanny Ardant, amante passionnée dans La Femme d’à côté (1981) et enquêtrice impétueuse dans Vivement dimanche ! (1983).
Bien que sillonnant des genres différents, du drame sentimental au polar en passant par le film d’époque, ces films exposent leurs héroïnes aux turbulences du dépit amoureux. La célèbre formule de Madame Jouve (Véronique Silver) dans La Femme d’à côté (« Ni avec toi ni sans toi ») cristallise toute l’ambivalence sentimentale de ces héroïnes. Chaque film met en scène des amours contrariées – à cause d’une relation extraconjugale comme dans La Peau douce et La Femme d’à côté, ou en raison d’une distance affective et géographique comme dans Les Deux Anglaises et le Continent. De cette impossibilité d’être ensemble résulte une émotion parfois si intense qu’elle fait vaciller, en témoigne le malaise de Mathilde (Fanny Ardant) dans La Femme d’à côté, qui s’évanouit après avoir embrassé son amant (Gérard Depardieu), quitté sept ans auparavant.
Antoine Doinel, la fougue de la jeunesse
Au fil des quatre films se dévoile l’évolution du cinéaste dans son approche des relations tumultueuses entre les hommes et les femmes, ces dernières se démarquant par leur tempérament et leur affirmation. À l’instar de Nicole (Françoise Dorléac) dans La Peau douce, qui impose sa liberté en quittant son amant lorsque celui-ci lui propose d’emménager ensemble. Une posture téméraire qui résonne avec celle de Barbara (Fanny Ardant) dans Vivement dimanche !, une secrétaire hardie et prête à tout pour prouver l’innocence de son patron (Jean-Louis Trintignant), accusé d’un double meurtre. À la fois espiègles et mystérieuses, ces héroïnes exaltent la pugnacité. Mais il demeure toujours une part insaisissable, un mystère, que le cinéaste tente sans relâche d’approcher par le romanesque.
Image LA PEAU DOUCE © 1964 LES FILMS DU CARROSSE / SEDIF / SIMAR FILMS. TOUS DROITS RÉSERVÉS