KIDS · La chorégraphe Marion Motin interviewée par Ulysse, Camilo et Anselmo

[INTERVIEW] À l’occasion du Hip-Hop 360 Show, des spectacles célébrant les 50 ans du hip-hop au Théâtre du Châtelet, Anselmo, Camilo et Ulysse, trois danseurs de 11 ans, ont interviewé Marion Motin, célèbre pour ses chorégraphies des clips de Stromae, Christine and the Queens et Dua Lipa.


Camilo : Tu travailles avec des danseurs de hip-hop et des danseurs de l’Opéra. Quelle est la différence ? 

J’ai commencé par le hip-hop, c’est ma culture. On est autodidactes, alors qu’un danseur de l’Opéra est cadré par des professeurs et doit faire preuve de rigueur pour entrer dans le corps de ballet. Dans le hip-hop, il y a beaucoup d’échanges et de transmission, mais le danseur est un soliste. En tant que chorégraphe, c’est plus facile d’accéder à sa personnalité. 

Anselmo : J’ai pu voir des images des répétitions de The Last Call, ta première création. Tout le monde souriait. Est-ce parce que ce sont de grands danseurs ou parce que tu ne les grondes jamais ?

Ce sont de merveilleux danseurs, et je  gronde peu parce que j’aime travailler dans la joie. La danse, c’est délicat, on utilise son corps et ses émotions. Les danseurs, je les imagine comme des petites fleurs que j’aide à s’épanouir. Après, je peux corriger un mouvement et être ferme, mais sans méchanceté, c’est un échange.

Ulysse : Pour chorégraphier le clip du morceau « Papaoutai » de Stromae, as-tu pensé à une matière comme le chewing-gum ?

C’est vrai que Stromae est très grand, il a des bras immenses, chacun de ses mouvements a des répercussions décalées sur le reste de son corps, et puis il est très flexible. Il peut en effet évoquer un chewing-gum qu’on étire. On a tous des corps différents, et j’aime travailler en fonction pour que les danseurs ne soient pas dans un moule. 

C. : Comment t’entraînes-tu ? As-tu une routine quotidienne ? 

Dans la journée, je me mets en action en pratiquant du sport, de la danse ou de la corde à sauter… J’utilise mon corps, mais en respectant l’état dans lequel il est. Si je me sens fatiguée, je danse avec ma fatigue pour ne pas me blesser. Si j’ai la pêche, ce sera plus dynamique ! Je consacre aussi un petit moment à la méditation, je fais le vide, je me coupe de tout. Et puis chaque soir je lis, même si ce n’est qu’une seule page, je ne rate pas ce rendez-vous.

A. : Danses-tu toujours dans la rue ? 

Danser en extérieur me donne une sensation de liberté ; j’aime décloisonner la danse et la sortir du studio de répétition. C’est un art que l’on peut pratiquer n’importe où.

A. : Le breaking aux J.O., qu’en penses-tu ?

C’est super que tout le monde découvre cette discipline ! C’est la version acrobatique de la danse hip-hop qui sera représentée aux J.O., car il faut pouvoir juger les performances sur des critères précis.

U. : Pourquoi le hip-hop n’est pas enseigné au conservatoire ? 

Le hip-hop évolue avec la musique, les mouvements viennent du monde entier, et c’est compliqué de l’enfermer dans une technique d’apprentissage. Chaque danseur hip-hop fait évoluer un mouvement de danse en réinterprétant un geste qu’un autre danseur lui a appris. Ils sont donc tous différents mais tous connectés.

C. : Que ressens-tu quand tu danses ?

J’oublie tous mes problèmes, et cela me permet de me reconnecter à mon âme d’enfant, à mon cœur. J’ai revu le film Billy Elliot, l’histoire d’un petit garçon qui va se battre contre sa famille pour devenir danseur, et il dit que, quand il danse, il est comme de l’électricité. Moi aussi, j’ai cette sensation de disparaître et en même temps d’être connectée au monde entier, au ciel, aux animaux, à l’essentiel de la vie. Et après avoir dansé, je me sens super bien !

Image : © Ines Ferhat pour TROISCOULEURS