« J’ai dit Prévert mais je parlais de Jacques, c’est un lapsus… » On a du mal à distinguer les yeux de chat d’Anouk Aimée derrière ses lunettes noires, mais c’est bien la même voix hésitante qui nous parle. « Demy s’est inspiré de ma tendance à passer du coq à l’âne : oh, il fait chaud, oh, j’ai mal à la tête, oh, j’ai envie d’une cigarette… », confie l’actrice.
En 1961, Lola – le film – enchantait les écrans avec ses chassés-croisés amoureux dans un Nantes rendu magique par la photographie de Raoul Coutard, d’un blanc incandescent. Un « Demy-monde » de rencontres hasardeuses, de marins chantants et d’amours déçues. La cruauté douce du réalisateur réservera d’ailleurs à Lola – le personnage – un sort tragique : fantôme amer dans le Los Angeles de Model Shop, elle finira découpée en morceaux dans une chanson des Demoiselles de Rochefort.
Reste que Lola – la chanson phare, écrite par Agnès Varda – retentit encore dans le cinéma français malgré sa gestation difficile : « Quincy Jones devait composer la musique, mais a dû repartir. Du coup, on a tourné la scène sur un disque des Platters. Le résultat final n’a rien à voir avec le tournage ! » Romain Duris reprendra cette mélodie dans 17 fois Cécile Cassard de Christophe Honoré. Avec la même grâce, mais en string.